Bayrou, Edvige et Rossi

septembre 3, 2008 on 2:36 | In France | 2 Comments

Une fois de plus ils sonnent la charge. Ils, en l’occurrence, sont la coalition des anti-Sarko, des associatifs libertaires et des beaux esprits de gauche. L’objet de leur animosité: Edvige, le fichier informatique mis en place par la DCRI (Direction Centrale du Renseignement Intérieur).

Ce fichier recense toutes les « personnalités » françaises, que ce soit sur les plans économique, politique, associatif ou autre. Et il peut, dans certains cas, contenir des renseignements sur les affinités de telle ou telle personne fichée sur la plan religieux ou sexuel entre autres.

François Bayrou, président du MODEM, qui se voudrait premier opposant à Sarkozy pour pouvoir récupérer l’aile sociale-démocrate d’un PS en décomposition, recommande le « refus républicain » d’Edvige.

Edvige n’est pourtant pas une nouveauté. La DCRI est l’héritière directe des Renseignements Généraux, les célèbres RG, qui avaient déjà, en leur temps, une collecte d’information équivalente. S’élever contre Edvige aujourd’hui au nom de la vertu quand on a, comme Bayrou été ministre plusieurs fois du temps de ces fichiers des RG, c’est oublier à quoi il a donc mis la main en tant que membre du gouvernement.

Mais, au-delà de l’opposition systématique de certains, Edvige est-il une bonne chose? Dans un monde parfait, certainement pas, notamment quand il rentre très avant dans notre intimité. Nous aimerions tous vivre sans systèmes d’alarme, sans caméras de surveillance, et sans Edvige. Les caméras de surveillance, notamment, enregistrent qui est au bras de qui, ou dans la voiture de qui, ce qui est largement aussi intrusif que les renseignements glanés et stockés dans Edvige.

Le problème, c’est que là où les caméras filment, la criminalité baisse très nettement. Ce qui se voit aussi avec les accidents de la route. Depuis la mise en place des caméras-radar automatiques, le nombre de morts sur les routes a chuté de manière formidable, épargnant 2500 vies par an, sans compter les blessés évités, les veufs, veuves et orphelins en moins.

Et quand il n’y a pas assez de caméras, ou d’informations, ce manque est déploré lors de crimes odieux. Comme l’assassinat de la jeune Anne-Lorraine Schmitt, dans un wagon de RER sans surveillance. Ou le crime sexuel attribué à un récidiviste à qui un médecin de prison avait prescrit du Viagra, prescription couverte par le secret médical.

S’ajoute à cela que, quand la loi ne donne pas « assez » de droits, il arrive que la puissance publique passe hors la loi. Et quand elle se met hors la loi, ce peut être pour une bonne cause, mais aussi pour de moins bonnes. Comme certaines écoutes téléphoniques sauvages ordonnées par le Président Mitterrand. Comme la torture pratiquée sur les terroristes arrêtés en Afghanistan par les Américains pour les faire avouer à tout prix.

La question est donc de savoir dans quelle société nous voulons vivre, et il semble que, sur ce plan là, il faille savoir quel point d’équilibre trouver entre « plus libre », et « plus sûre ». Les Etats-Unis ont clairement choisi « plus sûre », avec un Patriot Act (loi patriote), qui annule de nombreux droits individuels, à commencer par le fondamental habeas corpus. La Grande-Bretagne a fait le même choix, avec d’innombrables caméras de surveillance. Et ce débat est trop sérieux pour s’en servir à des fins bassement politiques.

Curieusement, les détracteurs d’Edvige, Bayrou en tête, sont les mêmes qui se sont opposés à la mutation de Dominique Rossi, coordinateur des forces de sécurité en Corse, pour avoir laissé des indépendantistes folâtrer librement dans la villa de Christian Clavier. Pourtant, il semble à JusMurmurandi que laisser n’importe qui violer la loi, ce n’est rendre la vie en France ni plus sûre, ni plus libre.

2 commentaires

  1. J’avais cru comprendre que Londres était devenu une ville assez violente avec des attaques aux couteaux qui explosent, alors que la vidéo y est bien implantée (ce que vous mentionnez). Je dois être mal informé, une nouvelle fois.

    Commentaire by Blop — 4 septembre 2008 #

  2. Mais non, cher Blop, vous n’êtes pas mal informé, encore que je n’aie aucune information sur votre niveau d’information. Simplement votre commentaire ne contredit pas JusMurmurandi (désolé!).
    Nous avons dit (et nous maintenons) que l’installation d’un réseau de caméras vidéo visibles fait baisser à cet endroit la criminalité de façon incontestable. Que ce soit dans le métro parisien ou dans les agglomération anglaises. Mais ceci est par comparaison avec la criminalité avant la pose des caméras. Cela n’affecte pas nécessairement la criminalité globale d’une agglomération si celle-ci se déplace là où il n’y a pas de caméras. Et, de toute façon, faire baisser la criminalité par rapport à une situation sans caméras est une baisse relative, qui n’est incompatible ni avec un niveau de criminalité élevé en valeur absolue ni avec une progression de ce niveau.
    Il est d’ailleurs intuitivement logique que ce soit justement là où (et parce que) la criminalité est élevée qu’on installe des caméras.
    Alors, heureux? Comme dit la pub LCL?

    Commentaire by JM2 — 5 septembre 2008 #

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