La Françe malade du capitalisme à la française

septembre 14, 2008 on 6:29 | In Best of, Economie, France | Commentaires fermés

Les Français n’aiment pas leur capitalisme. Est-ce en raison de leurs racines catholiques, si présentes en ces temps de visite papale? Est-ce parce qu’enseignés pendant des décennies par un corps professoral très largement de gauche, voire marxiste? Est-ce parce que les milieux d’affaires se seraient disqualifiés dans l’opinion publique en flirtant avec le régime honni de Vichy?

Peu importe. Le fait est là, les Français n’aiment pas leur capitalisme. Il suffit pour cela de voir les connotation négatives des mots « profit », « concurrence », « gros salaires », voire, pire, « libéral », ou « stock options », pour voir le rejet de l’idéologie capitaliste par l’opinion.

Et, corollaire, la carrière professionnelle souhaitée par le plus de jeunes Français est tout naturellement, compte tenu de ce rejet, celle de fonctionnaire.

Jusqu’ici, les Français s’appuyaient sur un pays qui leur semblait proche pour refuser le modèle capitaliste. Ce fut tout le débat entre le capitalisme anglo-saxon, perçu comme « ultra-libéral », dur sans coeur,impitoyable pour les faibles, et capitalisme rhénan, où nos voisins allemands partageaient avec nous le goût « d’amortisseurs sociaux » généreux et de services publics étoffés pour que personne ne soit vraiment abandonné dans la misère au bord de la route. Quitte à financer cela par une pression fiscale nettement plus forte qu’en Grande-Bretagne ou au Etats-Unis.

Et le Français plébiscitent encore ce refus du capitalisme « dur », que ce soit contre la fermeture de services publics dans les toutes petites communes, contre toute tentative de rationalisation financière des systèmes de santé, contre toute réduction du nombre record de fonctionnaires.

Le problème,, c’est que le capitalisme rhénan n’est plus ce qu’il était. Deutsche Bahn, l’équivalent allemand de la SNCF, s’est lancé à corps perdu dans la concurrence pan-européenne, devenant, notamment grâce à des acquisitions, l’un des champions de la logistique et du transport express. Deutche Post aussi, qui est aujourd’hui un des concurrents qui compte sur de bonnes vieilles recettes capitalistes pour tailler des croupières, en France même, à notre « la Poste » nationale et nationalisée, arc-boutée sur une visions franco-française et figée, et dont les syndicats et la base refusent absolument toute idée d’ouverture du capital. Pendant que, de l’autre côté du Rhin, Deitsche Post vend 30% de son bras financier à son nouvel allié, la puissante Deutsche Bank, première banque privée allemande, pour mieux concurrencer le nouveau géant qui naîtra de la fusion entre Commerzbank et Dresdner Bank, respectivement N° 2 et 3.

Le même séisme est à l’oeuvre sur le plan social, où le plan « Harz IV » limite les allocations des chômeurs qui refusent des offres d’emploi, et où le gouvernement a rétabli les finances publiques, autrefois aussi déficitaires que les nôtres, par une seule augmentation massive de la T.V.A., impôt réputé ici « anti-social » parce que tout le monde le paye, peu ou prou.

Dans le même temps, le capitalisme « ultra-libéral » n’est plus, lui non plus, ce qu’il était. Lorsque des institutions financières américaines ou britanniques se sont trouvées prises dans la tourmente de la crise immobilière, les Etats n’ont pas rechigné à intervenir, et à nationaliser. Les Etats-unis vont ainsi injecter 200 milliards de dollars dans Fanny Mae et Freddie Mac, nationalisés le week-end dernier, tandis que la Grande Bretagne tente de revendre la banque Northern Rock, nationalisée dans l’urgence pour éviter une panique des épargnants.

Il est donc clair que ces deux modèles de capitalisme évoluent rapidement pour s’adapter en permanence à la donne économique. Et d’ailleurs leurs réformes sont souvent bi-partisanes, c’est à dire votées ensemble par leur droite et leur gauche politique, tant il y est clair que l’économie et la bonne gestion ne sont pas de droite ou de gauche.

Bref, on le voit, le capitalisme rhénan n’est plus ce cocon protecteur auquel aspirent les Français. Le capitalisme anglo-saxon n’est pas non plus cet enfer dénoncé par Viviane Forrester dans son livre « l’horreur économique », qui transforma des Français économiquement incultes en gens peureux et repliés sur eux-mêmes.

Mais pendant ce temps-là, me direz-vous, et la France? Et bien, justement, et la France?

Elle discute, avance de deux pas avant -toute effrayée de son audace- de reculer précipitamment d’un. Elit un Président qui se dit -enfin- de droite avant de voter quasiment un nouvel impôt ou taxe par mois. Ratiocine ses réformes comme si le mot seul allait précipiter sa fin. Créé avec le RSA une nouvelle allocation, sans doute intéressante, mais qui va se cumuler avec les précédentes, dont chacun sait qu’elle coûtent mais ne « marchent » pas. Va offrir une retraite minimum à de nouvelles catégories de Français impécunieux, agriculteurs et femmes d’agriculteurs notamment, sans prendre en compte que c’est le cas avant tout parce qu’ils n’ont pas cotisé, que les finances publiques sont exsangues et les Français déjà recordmen des impôts. Et que, pire encore, cela va une fois de plus démontrer que la source de l’argent en France n’est pas le travail mais l’allocation d’assistance. Sans compter ses projets d’intervention de l’Etat dès qu’une entreprise n’a pas d’autre recours. L’Etat, l’Etat, toujours l’Etat.

Cette France regarde avec ahurissement la gauche s’opposer à tout ce que propose la droite sur tous les plans parce que l’opposition politique lui parait plus payante que l’intelligence ou le courage. La voit se déchirer non sur des projets de société, auxquels ils ont renoncé depuis qu’ils ont vu leur modèle de générosité pour tous aux frais des autres voler en éclats, mais sur des querelles de personnes pour prendre la place de leader.

Comment s’étonner, après, que notre voisin allemand, autrefois si proche, connaisse aujourd’hui, et ce malgré le fardeau toujours très lourd d’une réunification vieille de moins de 20 ans, une situation budgétaire équilibrée et un commerce extérieur excédentaire au moment où les déficits français, tant extérieur que budgétaire vont atteindre de nouveaux sommets?

Il est généralement reconnu que le système de santé français, pour hors de prix et en déficit chronique qu’ils soit, est un des meilleurs du monde pour le soin donné aux patients. JusMurmurandi s’en réjouit vivement. Parce que, vu la situation, ce sont toute l’économie et la société françaises qui vont bientôt être admises aux urgences.

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