La revanche du poovre Monsieur Brung et de la pooovre Europe

octobre 14, 2008 on 6:05 | In Coup de gueule, Economie, Europe, France, International | Commentaires fermés

Oh, non, ce ne sont pas les déshérités du monde qui sortiront gagnants de la crise actuelle. Les fonds engagés dans le soutien des banques viendront bien de quelque part, et il est clair que la part des pauvres n’en sortira pas grandie.

Non, il s’agit d’un autre genre de pauvres. D’abord, ce pauvre Monsieur Brun. Vous vous souvenez de Monsieur Brun? Celui qui, pour l’éternité, est dans l’ombre de César et d’Escartefigue dans une historique partie de cartes qui contient une des plus célèbres répliques du cinéma français: « tu me fends le coeur ». Et le pooovre Monsieur Brung (prononcer avé l’asseng, sans avoir peur d’en faire des tonnes) de jouer les comparses, un des petits Chose qu’on prend de haut, un peu étranger à toute cette « marseillaisitude ».

En anglais, « brun » se dit « brown ». Et les Britanniques ont aussi leur poor Mister Brown. Un Premier Ministre impopulaire, discrédité, ridiculisé, émasculé, menacé, et pas vraiment à sa place dans le fauteuil de Churchill, de Thatcher ou de son prédécesseur, ex-ami et meilleur ennemi Tony Blair.

Il y a un autre pooovre dans cette histoire, ou plutôt une, c’est notre pooovre Europe. Une Europe qui ne dit rien dans cette crise. Une crise venue des USA, et dont tout le monde attend que ce soit des USA aussi que vienne la solution. Surtout quand chaque pays européen veut sa propre solution au problème. Quand l’Allemagne de Merkel veut régler les problèmes au cas par cas, alors que la France veut un plan global et européen. Et que tout attendent, à un moment ou à un autre, que les européens copient le plan de l’américain Paulson.

Sauf que, de cette pooovre Europe rien ne vient, et que le plan Pauson se met à patiner, conduisant à la panique de vendredi dernier, qui prenait des allures de dernier vendredi.

Dans ce contexte, le plan de ce pooovre Mister Brown pour sauver les banques anglaises ne fit pas les gros titres. Ce d’autant que la situation britannique était particulièrement aventurée. Par la place importante de la finance dans l’économie, par son tropisme américain qui la fit s’engager plus que d’autres européens outre-Atlantique, par la bulle immobilière qui, comme aux Etats-unis, entraîne aujourd’hui une solide gueule de bois bancaire.

Garantir les crédits interbancaires, et investir dans les banques pour les recapitaliser, les nationaliser si besoin était. On attendait déjà l’ironie mordante à la Raimu qui ne pouvait manquer de saluer une si pooovre initiative d’un si pooovre européen.

Une semaine plus tard, l’Europe de l’Euro plus la Grande-Bretagne, c’est-à-dire l’Europe, réunie à Paris, parle d’une seule voix, et annonce un plan d’une ampleur sans précédent pour sortir de la crise. Cette pooovre Europe met sur la table près de 3 fois les capitaux du grand Oncle Sam, et réduit le flamboyant Hank Paulson au rôle de comparse. Lequel Paulson se hâte d’annoncer une modification de son plan pour ressembler à ceui des Européens.

Car le plan européen existe. C’est, à la virgule près, celui du pooovre Mister Brown. Et il suscite une réaction positive sans précédent des marchés financiers. +11% à Paris, Franfort et New-York, +14% à Tokyo. +14% à Tokyo!!! Comment dit-on « brun » en japonais? Il n’y a qu’à Londres que le triomphe est plus « modeste »: +8%.

Chapeau l’artiste! Mister Brown, si le succès se confirme et que votre plan est celui qui aura permis au monde de tourner le dos à l’abîme financier et économique vers lequel il se précipitait, votre triomphe sera le plus dur pour l’arrogance et l’orgueil des seigneurs de la finance. Pensez! Sauvés par la pooovre Europe et le pooovre Monsieur Brun…
le pooovre Mister Brown, sauveur du Monde?

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