Paradoxes à droite et à gauche

octobre 24, 2008 on 11:32 | In Economie, Europe, France, Incongruités, International | Commentaires fermés

L’Etat est de retour, tel Mac Arthur au Philippines, ou Schwarznegger le Terminator. Débâcle chez les libéraux ruinés et disgraciés, recours à l’Etat salué par tous, même chez les anglo-saxons, par les analystes financiers, les banquiers ou les professeurs d’économie, qui furent longtemps ses pires détracteurs avant d’en être réduits à mendier auprès de lui leur survie tel est le nouveau panorama économique mondial.
Voilà qui, avec les codes traditionnels de la politique divisée en « droite » et en « gauche », est manifestement de gauche.

Donc joie à gauche et pleurs à droite? Pas du tout. Parce que, quand c’est la droite bushiste, berlusconienne ou sarkozienne qui exécute ce retour de l’Etat, quel argument reste-t-il à gauche? Quand le plan français, donc de droite, est le même que les plans anglais ou espagnol, donc de gauche, ou allemand, donc coalisé droite et gauche, que peut dire la gauche qu’elle eût fait d’autre que ce que fait la droite?

D’autant que les sommes gigantesques que les Etats vont consacrer au sauvetage du système financier de leurs pays vont être autant de montants qui ne seront pas disponibles pour la distribution sociale qui fait les délices socialistes. Etre au pouvoir avec un Etat fort, mais surtout fort de ses dettes et de ses obligations et non pas de son rôle de providence, est-ce vraiment socialiste?

Mais la droite ne peut non plus se réjouir, car ce sont bel et bien les excès de ses mécanismes libéraux qui nous ont conduit au bord de l’abîme, et, un jour, il faudra bien en tenir compte et en payer le prix idéologique.

S’ajoute à ce paradoxe une autre situation toute aussi curieuse. Quand l’économie va bien, il est habituel de voir un gouvernement bénéficier d’une forte popularité. Quand elle va médiocrement, comme depuis un an, la cote de Sarkozy s’effrite logiquement, sanctionnant l’écart entre ses promesses et la réalité, et son impuissance. D’où une joie des socialistes français comme des conservateurs britanniques de ne pas avoir à gérer cette période, et une anticipation que la déprime économique allait leur servir toute prête la victoire aux prochaines élections.

Oui, mais voilà, de médiocre, la situation devient catastrophique, et Sarkozy en France, ou Brown en Grande-Bretagne sont ardents à la manœuvre, ce dont leur opinion publique les crédite immédiatement. Donc les mauvaises nouvelles profitent à l’opposition, mais les très mauvaises à la majorité. On en est presque à ce que les socialistes français doivent expliquer que la situation n’est pas si catastrophique que cela, pour tenter de convaincre qu’une autre politique française eût permis d’échapper à une crise mondiale. Difficile dialectique, autrement plus ardue que l’autisme russe ou chinois quand leurs dirigeants affirment que leurs pays ne seront pas touchés.

Voilà donc les oppositions contraintes de ne pas noircir le tableau tandis que les majorités le qualifient d’apocalyptique… Après que ces mêmes oppositions aient du cesser de s’opposer en voyant les majorités appliquer des idées qui, croyaient-elles, leur appartenaient. Voilà des Etats d’autant plus faible qu’ils ont épuisé leurs ressources à démontrer leurs force. Que de retournements imprévus.

Le plus curieux dans tout cela est le paradoxe suivant. Quand la France, à l’instar des autres pays, Etats-Unis compris, « garantit » le crédit interbancaire, ou les dépôts des épargnants, l’Etat n’a pas l’argent pour le faire. C’est un simple engagement, assis sur sa « réputation » dont tous souhaitent avec ferveur qu’il ne soit pas appelé à se concrétiser. Car il n’y a pas assez d’argent pour honorer ces engagements. C’est exactement ce qu’ont fait les AIG et autres Freddie Mac et Fanny Mae, et on sait où cela nous a mené. Etranges temps en vérité…

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