La fin du Gros Mammouth?

novembre 8, 2008 on 3:12 | In Coup de gueule, Economie, Incongruités, International | 1 Comment

Le dégel libère chaque année en Sibérie des corps de mammouths momifiés, conservés depuis des millénaires dans le permafrost. C’est la plus grande espèce animale terrestre depuis l’extinction des dinosaures, il y a des dizaines de millions d’années. D’où la fascination qu’a provoquée l’étude scientifique visant à donner la vie à un mammouth à partir d’ADN récupéré en Sibérie. Jusqu’ici sans succès, le Gros Mammouth est une espèce animale éteinte, et apparemment pas facile à « rallumer ».

Mais il n’y a pas qu’en matière animale que le Gros Mammouth a atteint son point final. En matière d’entreprise aussi, semble-t-il. Le dernier exemplaire connu, General Motors, a annoncé que son cash ne lui permettra de survivre que jusqu’au début de l’année prochaine.

General Motors, comme le Gros Mammouth, est l’entreprise de tous les records. Plus grosse entreprise mondiale pendant plus de 50 ans. Plus gros producteur d’automobiles pendant plus de 80 ans. Depuis la Ford T, c’est dire. Producteur aussi de locomotives, de turbines, de réfrigérateurs (Frigidaire, cette marque si répandue qu’elle est devenue un nom commun, si banale que c’est là que Ségolène Royal avait dit mettre « au frais » sa candidature au poste de Premier Secrétaire du PS, intention qu’elle manifestement oublié de mener à bien, c’est aussi General Motors). La seule société mondiale à employer plus d’un million de personnes? GM, bien sûr. La plus grande société de crédit à la consommation au monde? GMAC, sa filiale de financement des achats de véhicules GM. Une société si légendaire qu’elle est devenu le sujet de plaisanteries admiratives: ne disait-on pas que les deux meilleurs « généraux » américains n’étaient pas Patton ou Eisenhower, mais General Motors et General Electric?

Mais alors que General Electric s’est formidablement modernisée sous la la férule du génial Jack Welsh, General Motors ne l’a pas fait. Laissant les petits véhicules à ses concurrents japonais ou coréens, engluée dans des coûts de production très élevés concédés à des syndicats maximalistes, GM s’est concentrée sur les 4×4, utilitaires légers (trucks) et autres « Gros Modèles ». La moindre concurrence étrangère sur ce segment permettait d’y faire une plus forte marge bénéficiaire et évitait de se poser les questions qui fâchent sur sa compétitivité globale, que ce soit en termes de suivi des goûts de la clientèle ou de qualité des produits. Une concentration telle que GM a acheté la société productrice des célèbres Hummer, ces énormes 4X4 à la dimension d’Arnold Schwartzenegger (il en conduit un, mais converti au gaz naturel)

Le problème, c’est que la forte hausse des prix du pétrole a détourné les clients des véhicules Gros Mangeurs, et donc avant tout des modèles GM. Bien sûr, ses Grands Manitous plaident qu’ils ont mis en route un ambitieux programme de conversion de leur gamme aux véhicules petits et frugaux, y compris un nouveau modèle tout électrique révolutionnaire pour 2010, la Chevrolet Volt, mais voilà, les pertes s’accumulent, et maintenant la crise économique aggrave tout.

Après un mois d’octobre apocalyptique où GM vit se ventes chuter de 45% (!) pour revenir à leur plus faible niveau d’après 1945 (re !), la direction indique que les milliards de dollars de cash qu’ils ont encore suffiront tout juste pour les faire tenir jusqu’aux premiers mois de 2009…

GM avait d’ores et déjà demandé à l’Etat américain d’intervenir en sa faveur, comme il vient de le faire pour les banques, mais l’administration Bush, telle Ponce Pilate, vient de refuser. La déclaration de GM va mettre la toute nouvelle administration en construction de Barack Obama face à son premier défi, car l’effondrement de GM serait un tsunami bien plus symbolique que la chute de Lehman Brothers. Lequel effondrement entrainerait nombre d’équipementiers, dont Delphi, le N°1 mondial, anciennement partie de GM lui-même. Et que Ford et Chrysler, ses concurrents américains ne sont guère mieux portants, et pour les mêmes raisons.

Ce d’autant plus que GM est avant présente dans les états du Midwest dont Obama est l’élu, et que les cols bleus qui y travaillent et y sont syndiqués sont l’épine dorsale de l’électorat démocrate qui l’a porté à la Présidence. Obama a d’aillleurs annoncé dès sa première conférence de presse, hier, qu’il mettrait en œuvre un plan d’aide à l’industrie automobile.

JusMurmurandi entend bien que laisser tomber GM, pour un Président démocrate nouvellement élu, est impensable. Même si les règles de la concurrence mondiale rendent un plan de soutien incompatible avec l’OMC. Mais le problème, n’est-ce pas tout simplement que GM na pas produit assez de voitures compétitives que voulaient vraiment ses clients, comme les Opel européennes, et trop de Grosses Merdes? Et si Obama sait régler ce problème-là, c’est qu’il a vraiment quelque chose du Messie que tant de gens attendent en lui.
Cadillac Escalade EXT

Un commentaire

  1. Bel exercice de GramMaire, juste une petite précision, GM n’est pas la seule entreprise au
    monde avec plus de 1 million d’employés, il me semble même que la plus « grosse » entreprise mondiale est Walmart avec ses 1,4 Millions d’employés.
    Par contre GM est sans aucuns doutes la plus grosse entreprise manufacturière du monde.
    En capitalisation boursière je crois que c’était ExxonMobil mais je ne sais pas si c’est toujours le cas.
    Quoiqu’il en soit, le monde que nous connaissions est bien en train de changer (disparaitre ?), pour ceux qui en doutaient…

    Commentaire by bilbothobbit — 9 novembre 2008 #

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