Les suicidaires

novembre 16, 2008 on 3:50 | In Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, Insolite, International | Commentaires fermés

C’est la crise. Et pendant les crises, il y a des désespérés qui passent à l’acte. On se souvient que, pendant la Crise de 1929, des banquiers, atterrés (le mot n’est pas neutre) d’avoir tout perdu, ont sauté de leurs buildings pour mettre fin à leurs jours. Voit-on aujourd’hui de nouveau « pleuvoir » des banquiers? Pas à la connaissance de JusMurmurandi, et c’est heureux. Pourtant, on voit de nombreux comportements suicidaires. En voici quelques exemples:

Dans le genre, « faisons comme si la crise n’existait pas, et continuons comme par le passé »: les compagnies aériennes font face à une baisse de trafic alors que toutes étaient déjà en pertes profondes dues à un coût de kérosène exorbitant. Pour autant, les syndicats de pilotes, que ce soit chez Air France (prospère) ou chez Alitalia (en coma dépassé) luttent pour des avantages catégoriels comme s’il y a avait autre chose à distribuer que du sang, de la sueur et des larmes. Dans la même catégorie, la grève de la SNCF.

Dans le genre « sauvons notre peau sans nous demander si nous n’entraînons pas les autres dans une mort collective »: Henry « Hank » Paulson, Secrétaire américain au Trésor, a économisé quelques dizaines de milliards de dollars qu’aurait coûté le sauvetage de Lehman Brothers, mais coûté quelques centaines de milliards de plus aux Etats-Unis et dix fois plus dans le monde en raison de la panique que cette faillite a induite.

Dans le même registre, les traders qui continuent de prendre des risques, et le management qui les laisse faire, au sein de banques qui ont déjà perdu plus de fortunes qu’elles n’en avaient, comme Natixis (500 millions d’euros la semaine dernière), Dexia Slovaquie (93 millions sur des spéculations entre yen et rand sud-africain) ou les Caisses d’épargne (maison mère de Natixis, comme par hasard), avec 890 millions de pertes.
Ou encore, c’est très à la mode, les banques, qui, après avoir essuyé des pertes colossales dans l’immobilier américain, les produits dérivés ou les assurances, resserrent leurs conditions de crédit au PME et aux particuliers français pour « ne pas perdre d’argent dans la crise », imités en cela par les assureurs-crédit. Ce faisant, évidemment, ils étranglent l’économie française et l’enfoncent bien davantage qu’elle ne l’est, ce qui leur permettra a posteriori de montrer à quel point elles ont eu raison d’être si rigoureuses, vu ce qui sera arrivé entre temps. A ceci près qu’entre temps, ils auront éradiqué une partie de leur portefeuille clients et en supporteront donc les conséquences.

Dans le genre « la crise, c’est pour les autres mais pas pour nous », les banques qui provisionnent des bonus colossaux pour leurs employés au titre de 2008 alors même qu’elles auraient rejoint Lehman au cimetière des Seigneurs de la Finance si leur gouvernement ne les avait pas mises sous perfusion à coups de milliards d’argent des contribuables. Dans le même répertoire, celles qui se donnent de somptueux séminaires ou réceptions peu de jours après le début de ces perfusions. Ou les banquiers qui, après avoir perdu leur poste pour cause de pertes abyssales, estiment n’avoir pas échoué, ou mériter d’être repêchés, ou, mieux encore, gardent leur poste, tel l’inénarrable Bouton à la Société Générale, pas concerné par le pertes de l’affaire Kerviel.

Dans le genre « chez nous la crise, c’est permanent, donc on ne voit pas la différence avec avant, ni la promesse qu’après sera mieux, le parti socialiste français, dont le congrès de Reims s’achève sur le même fiasco que celui de Rennes il y a plus de 15 ans. Décidément le PS devrait se garder des villes de congrès dont le nom commence par « Re » et se termine par « s »…

Devant cette vague de comportements suicidaires, comment se réjouir? A moins d’être, comme chez Luky Luke, l’inénarrable croque mort, qui se réjouit à l’avance de ses nombreux futurs clients ?

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