Poulidor, Maire de la Capitule ?

novembre 18, 2008 on 7:19 | In Best of, C'est ça, Paris?, France, Incongruités, Insolite | Commentaires fermés

Raymond Poulidor, vous vous souvenez? Cet excellent coureur cycliste, dont la longue carrière est jalonnée d’efforts intenses, de luttes épuisantes et héroïques en dépit desquelles il n’a jamais gagné le Tour de France. D’abord par la « faute » de Jacques Anquetil, dit « Maître Jacques », une légende du sport, l’homme aux 5 victoires au Tour de France, puis du « règne » d’Eddy Merckx, dit « le Cannibale », qui, lui aussi, gagne 5 Tours de France.

Mais la façon si noble, si élégante, si sportive, loin des manoeuvres, des combines et des rancunes qu’avait Poulidor d’arriver 2e lui ont ouvert le cœur des Français, qui l’ont élu leur favori. Et il est certain que si la victoire au Tour de France avait été décidée par un vote des militants ou sympathisants du vélo, Raymond Poulidor eût été élu à une large majorité.

Mais la première qualité d’un sportif, c’est de ne jamais capituler. Perdre, peut-être, mais en donnant tout ce qu’on a, jusqu’au bout, même quand la victoire est impossible, même quand les places d’honneur sont hors d’atteinte. Lutter non seulement parce que c’est la clef de la victoire, mais parce que c’est la manière d’être et de vivre des champions. Et le pire, c’est de craquer, de coincer, de baisser les bras, de jeter l’éponge, d’abandonner, de capituler.

Parce que capituler, même une fois, c’est afficher, pour vous, vos concurrents, vos supporters, que, quand ça devient chaud, très chaud, il n’y a plus personne. Et cette faiblesse que vous dévoilez, on ne vous la pardonnera pas. Ni vos supporters qui attendaient de vous que vous portiez fièrement leurs couleurs au lieu de vous laisser couler avec. Ni vos adversaires qui sauront désormais où se trouve votre faille et comment en jouer pour bloquer désormais toute nouvelle tentative.

Les votes des militants socialistes ont porté Bertrand Delanoë à la deuxième place pour le congrès de Reims. Le problème, comme en sport, c’est qu’il n’y a qu’une place de vainqueur. Fort de la détestation que Ségolène Royal provoque chez de nombreux socialistes, le Maire de la capitale pensait pouvoir fédérer contre elle sur son nom, lui, le deuxième. Son évocation de sa différence d’avec sa concurrente, pour un parti de militants et non de supporters, ne manquait d’ailleurs ni de justesse ni de grandeur.

Oui, mais voilà, le ralliement n’a pas eu lieu. Le tour de France des fédérations socialistes ne se joue pas à Paris, et Martine Aubry l’avait compris. Et ce n’est pas une personnalité isolée qui peut gagner face à une équipe regroupant ses partisans, des fabiusiens et des strauss-kahniens.

Faute de ralliement, on eut l’affrontement. Aucun des 3 candidats, Aubry, Delanoë, Hamon, ne voulut céder, et on allait tout droit au vote des militants, laissant derrière un parti déchiré, à l’image en lambeaux.

Sauf que Delanoë n’a pas perdu ce vote, comme il a perdu celui pour les Jeux Olympiques, en arrivant, là aussi, deuxième derrière Londres, parce qu’il a capitulé avant. Non seulement il a jeté l’éponge avant le dernier combat, mais il a annoncé ne pas donner de consigne de vote. Sauf que, 48 heures après, toute honte bue et tout amour-propre jeté à la rivière, il appelle à voter pour Martine Aubry, ayant donc compris comment ce qui était impossible à Reims ne l’était plus à Paris. Et perdant au passage le bénéfice, le dernier qui lui restât, celui d’avoir été le candidat qui avait préféré éviter au parti socialiste encore plus de division et de lutte fratricide et partisane.

Sauf que, comme nul n’aime les capitulards, de nombreuses voix s’élèvent dans son propre fief pour dire leur dégoût de sa consigne de vote et lui préférer le vote Royal.

Une chose est sûre. Non, pas le nom du prochain ou de la prochaine premier secrétaire du PS.

Mais que Raymond Poulidor, lui, n’aurait jamais, ah non jamais! capitulé.

Bertrand Delanoë

No Comments yet

Désolé, les commentaires sont fermés pour le moment.