Ségolène Royal est-elle General Motors?

décembre 8, 2008 on 8:49 | In Economie, France, Incongruités, Insolite, International | 2 Comments

Les 3 producteurs américains d’automobiles, GM, Ford et Chrysler avaient demandé la semaine dernière aux élus américains une injection immédiate de 39 milliards de dollars pour éviter la faillite à court terme (quelques semaines).

Les politiciens américains, ne sachant si c’était du lard ou du cochon, n’ont osé ni les envoyer paître, c’est-à-dire faire leur vrai travail qui consiste à gérer leur boutique de façon rentable sans soutien du contribuable, ni les satisfaire, faute d’être convaincu de 3 facteurs: que cela soit indispensable, que cela serve à quelque chose d’autre que prolonger de quelques mois la vie d’entreprises condamnées, et que cela soit politiquement acceptable.

Ils vont donc proposer une aide de 15 milliards à deux d’entre eux, puisque Ford, moins menacé que ses deux concurrents, pourrait s’en passer dans l’immédiat.

Ce qui frappe tout d’abord, c’est que c’est beaucoup trop peu d’argent. General Motors à lui seul brûle 2 milliards de dollars de cash par mois dans les conditions actuelles de marché très déprimé. Lui accorder 10 milliards, c’est tout juste 5 mois de vie, si on alloue la totalité des fonds au fonctionnement quotidien, c’est-à-dire zéro à la réorganisation (réduction des coûts et des capacités, rationalisation des produits, développement de voitures plus sobres). Et 5 mois, pour un mastodonte comme GM, ce n’est rien, quand on sait que le développement d’un nouveau modèle, c’est au minimum 5 ans. 5 mois, ce n’est même pas le temps qu’il faut pour arriver à un accord de réduction de capacité avec le syndicat UAW, qui risque en cas de faillite de voir ses membres et ses retraités ne plus rien avoir faute d’avoir voulu conserver trop d’avantages acquis.

Car, que personne ne s’y trompe, la faillite de General Motors aurait des conséquences incalculables. Quel consommateur voudrait d’une voiture dont le fabricant ne sera plus là pour assurer l’après-vente, et dont la valeur de revente sera quasi-nulle? S’en déduit que, dans l’automobile, la faillite entraîne souvent la liquidation pure et simple, avec effet en cascade sur les employés, les sous-traitants, les concessionnaires, les retraités, et tous ceux que ces millions de consommateurs font vivre. Il est d’ailleurs possible que tout le bruit fait autour de la faillite possible entraîne dès à présent une désaffection pour cause d’inquiétude des clients potentiels, et que le bébé soit déjà irrémédiablement parti à la rivière avec l’eau du bain.

15 milliards de dollars, c’est donc un saupoudrage, un pourboire, un alibi pour que, quand la catastrophe arrive, tous puissent dire, tel Ponce Pilate, que le sang versé ne retombera pas sur leurs mains. C’est aussi la certitude que les mêmes politiciens vont voir revenir les mêmes fabricants avec les mêmes demandes, les mêmes menaces et les mêmes promesses dans quelques mois. Mais, là, Barack Obama aura pris ses fonctions, et ce sera à son équipe de gérer le problème. 5 mois, c’est donc le temps de lâchement acheter sa paix et de refiler le bébé à autrui.

Le saupoudrage et l’alibi, deux méthodes bien connues de la part de politiciens dont le courage ne constitue certes pas toujours la qualité première. Pourtant JusMurmurandi voudrait vous proposer un contre-exemple frappant, et, qui plus est, en France.

Martine Aubry devait composer l’équipe dirigeante du PS pour les 3 prochaines années. Et satisfaire les demandes de ses partisans, des fabiusiens, des strauss-kahniens, des partisans de Bertrand Delanoë ou de Benoit Hamon, qui avaient le mérite de l’avoir soutenue. Sans compter les partisans de Ségolène Royal, de façon à pouvoir rassembler ceux qui l’avaient combattue. Un exercice d’équilibrage dans la répartition d’une difficulté qui confinait à l’impossible.

Eh bien Martine Aubry a fait preuve de courage plutôt qu’oeuvre de saupoudrage. Ségolène Royal n’aura rien. Ce qui permettra d’éviter de la voir revenir dans quelques mois avec les mêmes demandes, les mêmes menaces, les mêmes promesses. Et, comme avec l’automobile américaine, la cote de Ségolène auprès des consommateurs politiques s’est d’ores et déjà effondrée en faveur de Martine Aubry ou Dominique Strauss-Kahn.

Ce qui oblige JusMurmurandi à poser la question: la faillite de Ségolène Royal, qui avait encore une part de marché de 47% en France en 2007, et de 50% au PS en novembre, le PS peut-il se la permettre?
Ségolène Royal

2 commentaires

  1. Cher Jus.

    La faillite chez Ségolène ROYAL se situe au niveau de son idéologie passéiste, de son renoncement à construire un vrai programme avec des idées cohérentes et défendables et acceptant le marché (le flirt outrancier avec BAYROU n’étant qu’une passade dans la droite ligne du TSS).

    La faillite chez un nombre incroyable de personnes est de croire qu’elle fera avancer les choses et de voter pour elle. Dieu merci, ce n’est pas elle aux commandes en cette période de crise.

    Pour le moment, elle continue d’exister médiatiquement et à l’intérieur du Parti Sinistré (ou Suicidaire en fonction des calembours) sans avoir à assurer la moindre responsabilité, sans avoir à prendre de décision réelles et assumer des choix qui ne tolère la réalité et la posture démagogique.

    Il faudrait attendre un peu pour voir à quel niveau son aura s’étiolera, si tant est qu’elle le fasse.

    Cordialement

    Commentaire by Sébastien — 8 décembre 2008 #

  2. L’analyse que fait JusMurmurandi du « phénomène » Royal est qu’il est à double face.

    D’un côté, une argumentation où l’opportunisme sans vergogne pour se saisir des causes « chaudes » de l’instant le dispute à l’inconséquence. Ainsi, pour répondre à la crise, elle proposait d’annuler le paquet TEPA (annulation présumée populaire, les socialistes ayant réussi à le faire étiqueter « cadeau pour les riches ») pour, avec l’argent ainsi récupéré, distribuer un 13e mois à 8 millions de Français. Comme elle ne dit surtout pas quels 8 milions (des fonctionnaires, qui sont la base électorale du PS, ou des gens du privé, ou les bas salaires), beaucoup peuvent espérer la générosité de la Madone du chabichou.

    L’autre côté, c’est sa réelle capacité d’attraction parce qu’elle a bien compris comment bénéficier du côté « paillettes et télé-réalité » de notre société pour une femme comme elle, moderne comme Obama l’est: Internet et Blackberry, débats participatifs et réseaux sociaux, look millimétré et événements médiatiques.

    Ce que constate JusMurmurandi, c’est que les adhérents de la « forme » moderne de Ségolène Royal sont totalement indifférents à une quelconque déficience programmatique. Moderne ils la veulent, et moderne ils l’ont.

    Ce qui fait douter qu’Aubry ,qui avance programme de gauche variante 1981 en tête, puisse avoir la moindre capacité d’attraction ou de séduction sur cette moitié du PS. Pourtant, elle a bien saisi ce qui se passe, quand elle parle de la dichotomie entre parti de militants (les siens) et parti de supporters (ceux de SR). Mais peut-être son côté première de classe et la vanité commune à de nombreux énarques lui donnent-ils à penser que travailler et avoir raison à l’ancienne sont encore et toujours les seules clefs du succès, surtout face au côté saltimbanque et esbroufe de la Royal.

    Si tel est le cas, comme vous, cher Sébastien, JusMurmurandi souhaite bien du plaisir au PS pour les mois qui viennent.

    Commentaire by JM2 — 8 décembre 2008 #

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