Nous sommes tous des Madoff!

décembre 30, 2008 on 6:37 | In Best of, Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, International, La Cour des Mécomptes | 6 Comments

Bernard Madoff est un escroc, c’est maintenant une affaire entendue, même si la procédure judiciaire est très loin de l’avoir mené à une condamnation. Mais, de son propre aveu, les rendements qu’il promettait et servait à ses investisseurs venaient des dépôts d’autres investisseurs. Et il en fallait encore d’autres pour servir le rendement de ceux-là, et ainsi de suite jusqu’à la culbute finale. Ce schéma, appelé « pyramide », est bien entendu illégal.

En France, la pyramide des âges (tiens, encore une pyramide) fait que le pays passe graduellement d’un stade où il y avait 3 actifs pour un retraité, dans les années 60, à celui, en 2020, où il y aura un retraité pour un actif. Ceci est du à l’allongement de la durée de vie, au rajeunissement de l’âge de départ à la retraite (aujourd’hui vers les 58ans), et à la chute de la natalité après le baby-boom.

Qui peut imaginer sérieusement que l’actif en question pourra non seulement subvenir à ses besoins mais aussi à ceux d’une autre personne? Justement, personne. En attendant, le système par répartition prend les cotisations versées par les « nouveaux cotisants » et les attribue aux « anciens ayant-droits ». Et la culbute du système aura lieu quand il n’y aura plus assez de nouveaux cotisants pour financer les droits existants.

Qu’on m’explique en quoi ce système diffère du système -pénalement condamnable- de Madoff?

Autre question. L’Etat français, qui avait des finances équilibrées par le tandem Giscard-Barre jusqu’en 1980, a creusé des déficits et une dette publique vertigineux depuis lors, droite et gauche confondues. Notamment, il a multiplié les systèmes de « droits » non limités en montants, tels notamment le RMI ou la CMU, dont le nombre d’allocataires n’est pas plafonné, alors qu’il n’y a comme ressource en face que le budget général de l’Etat.

Tant que les ressources croissent, le système donne l’apparence de tenir debout. On prend les impôts versés et on les redistribue vers les bénéficiaires. Mais si les nouvelles rentrées ne suffisent plus à éteindre les droits acquis, il y a une impasse budgétaire (qu’en termes doux ces choses-là sont dites) qui ressemble fort à ce qui est arrivé à Madoff et à ses déposants.

L’origine de ces pyramides d’Etat est simple. Quand on a créé le système de retraites, on en a fait bénéficier des gens qui n’avaient pas cotisé. Aujourd’hui encore, quand la classe politique déplore, avec une belle unanimité, les toutes petites retraites, notamment des artisans commerçants et paysans, ils « oublient » au passage que ceux-ci n’ont pas cotisé beaucoup.

A l’école, les jeunes français apprennent que, sous Henri IV, leur roi préféré, l’un des deux seuls qui ait baissé les impôts, le bon ministre Sully disait que « labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». Ce sont deux activités productives. Aujourd’hui, si l’on parle de mamelles de la France, tous penseront allocation et pensions. Et voudront consommer du lait même s’il n’a pas été produit. Qu’importe si, à trop la traire, on tarit la vache.

La case faillite, ce n’est que pour les vulgaires Madoff. Quand son système explose, on dénonce la pyramide. Quand l’Etat français fait exactement la même chose, c’est un système par répartition unique au monde…

6 commentaires

  1. bah merde, je pensais que Delanoe qui équilibrait son budget en augmentant les impots plutot que de laisser filer les déficits, c’était mal.

    Sinon, en matière de retraite, vous préconisez quoi ? Sachant que les sociétés (dont celle que je gère) est quand même très réticentes à employer des vieux.

    Commentaire by blop — 30 décembre 2008 #

  2. Le problème est que Delanoë augmente les impôts de 9%+3% en pleine crise économique, alors qu’il semble bien que ce soit une relance keynesienne qu’il faille appliquer, c’est-à-dire l’inverse. BD est d’ailleurs à contre-temps de son propre parti, qui trouve le plan de relance du gouvernement très insuffisant par rapport à ce qu’il faudrait faire, en tout cas à leur avis.
    Quant aux retraites, il faudrait commencer par arrêter de raconter n’importe quoi. L’équation qu’on sert aux Français, à savoir que leurs cotisations d’hier et d’aujourd’hui leur vaudront des droits demain est une escroquerie pure et simple. Ceux des Français qui y croiront et miseront leur niveau de vie futur là-dessus seront inévitablement trahis par l’avenir. La seule conduite prudente est pour chacun de préparer sa propre retraite sous forme d’épargne et non pas de « droits » tellement hypothéqués par les générosités passées qu’ils sont on ne peut plus hypothétiques. Peu importe que cette épargne soit sous forme de fonds de pension ou d’assurance-vie, c’est le principe qui est vital, pas les modalités. Pour le reste, si l’Etat affectait à un fonds de complément de retraite, comme c’était prévu, les recettes de privatisations (La Poste, EDF, enfin ce qui reste, quoi), ce serait un pas dans la bonne direction pour éviter ce qui sera, à mon humble avis, une explosion sociale majeure. Une vraie lutte des classes…d’âge!

    Commentaire by JM2 — 30 décembre 2008 #

  3. Quand Delanoe prend de l’argent à ces administrés.
    1/ Il achète des montres suisses de luxe comme ça semble à la mode chez les socialistes.
    2/ Il investit dans des équipements, dans des salaires (en embauchant du personnel même à rien faire.
    Bref, il fait aussi de la relance par l’investissement, sauf si vous pensez qu’il soit aussi collectionneur de montres.

    Si vous laissez le fric aux français (en n’augmentant pas les impôts), ils peuvent aussi aller acheter des montres suisses. Ou des playstations. Bref, pas sur que cet argent aille réellement dans l’économie française.

    Pour les retraites … le pb est le même avec la capitalisation, lire Ecopublix par exemple, excellent blog économique.
    Moi, je suis assis sur un stock de pognon, et je sens que je vais me faire enfler si je le garde sur des placements types PEL, PEA, CEL, livret A etc… Car j’ai l’impression qu’une sortie de crise possible soit une inflation qui lessiverait les épargnants.
    Mais je ne suis pas devin comme vous. Ni prof d’économie sarkoziste.

    Joyeuse année à vous et votre bourgeoise.

    Commentaire by Blop — 31 décembre 2008 #

  4. Désolé, cher Blop, mais embaucher des fonctionnaires, ce n’est pas faire de la relance par l’investissement. Le faire, comme Delanoë, en utilisant les recettes d’un boom immobilier forcément éphémère, comme tous les booms, alors qu’il créé des dépenses pérennes n’est pas de la bonne gestion, et conduit à la hausse d’impôts à contretemps et contrecycle dont parle l’article. Mais c’est évidemment populaire, car, de plus en plus, le « beaucoup » quantitatif a remplacé le « bien » qualitatif. Ainsi, suivant les revendications des syndicats de l’Education Nationale, la France a consenti un effort budgétaire sans précédent pour diminuer le nombre d’élèves par classe, le modèle sous-jacent étant qu’avoir moins d’élèves par classe conduirait à une meilleure éducation. Eh bien, c’est raté, le taux d’élèves ne sachant pas lire et écrire à l’entrée en sixième n’a jamais été aussi élevé, ce qui, soit dit en passant créé des adultes qui n’auront aucune chance dans le monde moderne, et qui auront, non sans quelques raison, un sentiment de désespoir et de trahison porteur de catastrophes futures, sans parler d’un coût social épouvantable et d’un gâchis dont les générations futures nous tiendront responsables. Il est grand temps de revenir au « bien » à la place du « beaucoup », et, en l’espèce, qu’être un bon maire n’est pas forcément un maire qui emploie un effectif fonctionnaire pléthorique.
    Bonne année à vous, je crains que nos voeux ne soient pas de trop pour ce qui vous attend.

    Commentaire by JM2 — 1 janvier 2009 #

  5. Mais les fonctionnaires pléthoriques, ils consomment aussi avec leur salaire, non ?

    Donc vous préférez une aide à la casse qui va permettre à nos concitoyens d’acheter des bagnoles produites en Slovaquie ou en Espagne !

    Hum, curieux.

    Enfin, bon, ça ne me dit pas où je dois foutre mon pognon … c’est chiant d’en avoir.

    Commentaire by Blop — 1 janvier 2009 #

  6. Toutes les dépenses ne se valent pas, cher Blop. Toutes les études sérieuses montrent que les prélèvements nécessaires pour financer un poste de fonctionnaire « coûtent » entre 4 et 5 postes productifs. Donc des fonctionnaires pléthoriques sont terriblement destructeurs de richesses. L’augmentation de la pression fiscale est une des raisons qui conduit à ce que les petites voitures produites en Europe centrale soient plus compétitives que celles produites en France, ce que JusMurmurandi déplore. Il serait donc temps de se pencher sans démagogie sur la compétitivité de la France comme plate-forme manufacturière. Savez-vous par exemple que la seule taxe professionnelle s’élève à quelques 800€ par voiture produite en France quand on compte celle payée par le fabricant et par les sous-traitants? 800€, c’est le tiers de l’écart de coût avec la Slovaquie. D’où le fait que supprimer la taxe professionnelle rendrait, toutes autres choses étant égales, c’est-à-dire sans nouvelle taxe sur les entreprises pour financer la disparition de celle-ci, la France plus concurrentielle. D’où l’intérêt aussi d’examiner si le rapprochement de certaines collectivités territoriales ne pourrait pas générer, à services constants et égaux en qualité, des économies importantes, qui pourraient elles aussi servir la compétitivité nationale.
    Quant à votre trop plein d’argent, posez-vous la même question que vous posez pour Delanoë. Est-ce que l’investir revient au même que d’embaucher quelques improductifs de plus?

    Commentaire by JM2 — 1 janvier 2009 #

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