Le rêve de King devient, grace à Obama, réalité. Ou devient-il cauchemar?

janvier 20, 2009 on 3:45 | In France, Incongruités, International | 3 Comments

Martin Luther King avait un rêve, celui d’une Amérique réunie, apaisée, où la couleur de la peau ne serait plus que la conséquence d’une différence de pigmentation, et non la cause d’une différence de traitement.

Son investiture aujourd’hui, on a envie de dire son intronisation ou son couronnement, donne à penser à beaucoup que ce rêve est devenu réalité. JusMurmurandi espère que cela se révèle vrai.

Mais deux obstacles se dressent sur la route d’Obama, en dehors de ceux que le monde jette en travers de tous les Présidents américains, qui ont un emploi qui passe pour le plus difficile du monde.

Le premier réside dans les attentes phénoménales qui sont placées en lui, sans même qu’il y soit pour quelque chose, ni qu’il y puisse nécessairement quoi que ce soit. Plus un politicien arrive au pouvoir nimbé de la confiance de tous, plus il a des chances de réussir, tant la confiance est aujourd’hui un moteur du monde. Mais plus il doit satisfaire des attentes, et plus il a des chances de décevoir rapidement. Un parallèle s’impose avec l’Afrique du Sud. L’ANC de Nelson Mandela est arrivée au pouvoir après des décennies d’un pouvoir blanc compétent, raciste et ségrégationniste. Le bilan n’est pas uniformément rose. Notamment, pour les noirs qui attendaient de leurs frères de couleur qu’ils leur donnent accès à l’égalité économique, à l’emploi, à l’électricité, au logement, le rythme du progrès est trop lent, beaucoup trop lent. Raison pour laquelle ils ont éjecté leur propre Président en place, Thabo M’Beki, compétent et noir, mais pas suffisamment généreux à leur gré, pour le remplacer dans quelques mois par Jacob Zuma, autrement plus large en paroles et en promesses.

C’est la route qu’a suivie le Zimbabwe. Elle démontre qu’être noir après des blancs ne donne pas des droits mais des devoirs, et que le réalisme n’y a pas forcément sa place. Un sacré défi pour Obama, le temps de la lune de miel passé.

L’autre obstacle est que, jusqu’ici, les noirs ont pu faire valoir que leur absence relative de réussite était due à une forme de discrimination. La large élection d’Obama par un électorat en grande majorité blanc montre que ceux-ci ne discriminent as tant que cela, puisqu’ils ont jugé un homme à peau noire capable et digne d’assumer la charge suprême, éblouissant une fois de plus le monde par la formidable énergie démocratique de l’Amérique. Dès lors, une peau noire ne pourra plus, comme avant, servir de prétexte et d’excuse pour tous les échecs. Ainsi par exemple le footballeur vedette O. J. Simpson a-t-il réussi à se faire acquitter d’une accusation de double meurtre en expliquant à un jury largement noir qu’il était la victime d’une machination de policiers largement blancs. Maintenant, expliquer que les blancs rejettent, méprisent et/ou haïssent les noirs ne sera plus aussi simple et binaire.

D’une certaine façon, l’élection d’un noir représente la même forme de disparition d’un barrière jusque-là infranchissable que l’élection d’une femme. Ce qui eût pu arriver aux Etats-Unis, où Obama a eu beaucoup plus de mal à vaincre Hillary Clinton lors de primaires démocrates longues et indécises, que son concurrent républicain, le vieillissant John Mc Cain, ainsi qu’ en France, où Ségolène Royal a longtemps caracolé en tête des sondages devant tous les hommes, et notamment devant Nicolas Sarkozy qui l’a pourtant nettement battue en mai 2007.

D’où l’étonnement (le mot est faible) de JusMurmurandi devant la déclaration de Mme Royal, allée aux Etats-Unis pour assister à la cérémonie d’investiture du nouveau Président, qu’elle a inspiré Obama et que les équipes du gagnant américain ont copié la perdante française. Ainsi elle dit que l’équipe américaine a trouvé dans « Désirs d’avenir » la notion de « gagnant-gagnant », car elle ne sait pas qu’aux Etats-Unis le « win-win » est passé dans les moeurs depuis belle lurette.

A l’humble avis de JusMurmurandi, Ségolène Royal ne mesure pas qu’elle vient ni plus ni moins de s’attribuer la place de Martin Luther King. Il faut dire qu’après Jeanne d’Arc, pourquoi pas?

Barack Obama, Président des Etats-Unis d'Amérique

3 commentaires

  1. « L’ANC de Nelson Mandela est arrivée au pouvoir après des décennies d’un pouvoir blanc compétent, raciste et ségrégationniste. »
    Quels sont vos critères pour qualifier  »le pouvoir blanc » de compétent ?
    Parce que moi je ne l’ai jamais vraiment trouvé compétent ce pouvoir sauf si le critère n’est qu’économique (et encore), ce qui me semble réducteur.

    « Un parallèle s’impose avec l’Afrique du Sud »
    Je trouve un peu osé, voire étonnante, la comparaison entre Obama, métis je le rappelle parce qu’à force de dire qu’il est noir on va finir par le croire ;) , élu dans un pays ou le métissage est roi et qui compte 10% de sa population noire, avec des pays d’Afrique qui eux ont, à l’origine 100% de noirs.
    Quand Mendela est arrivé au pouvoir, l’Af Sud comptait 4 millions de blancs, soit 16% (aux origines douteuses… essentiellement des Afrikaners descendant des premiers colons hollandais) et 29 millions de noirs, il était naturel que ce pays soit dirigé par un noir tout comme le Zimbabwe, ex Rhodésie qui devait son nom à Cecil Rhodes, colonisateur britannique, si c’est pas Mégalo ça…
    Bref les attentes suscitées aux US et dans le monde par l’élection d’Obama ne sont, à mon avis, pas comparable avec ce qui s’est passé en Af Sud et au Zimbabwe de par le contexte et par l’histoire de ces pays.

    Pour O. J. Simpson c’est simplement une question d’argent, même si les médias, toujours aussi compétents, ont voulu faire croire à une histoire de vilains policiers blancs contre le pauvre noir (je vous rappelle la une controversée du Time avec sa peau noircie et son n° de matricule intégré dans l’image) . Le contexte de l’époque était propice à ce genre de chose notamment après l’affaire Rodney King qui, suite aux acquittements scandaleux des policiers, déclencha les émeutes à Los Angeles en 1992.
    Simpson fut arrêté en 1994 et jugé en 1995, pour mémoire il a été acquitté au pénal mais reconnu coupable au civil.
    Si cette affaire se reproduisait aujourd’hui, Obama ou pas, on pourrait revivre la même chose car, bien que le contexte ait changé, si un accusé noir trés riche comme Simpson à l’époque et de surcroit célèbre (ex : Michael Jordan) arrivait à « convaincre » les médias que des policiers blancs l’ont « agressé », les médias referaient la même chose.
    D’ailleurs il doit avoir moins d’argent en ce moment (donc moins de journalistes enclins à le défendre) puisque suite à un vol à main armé dans un hotel casino de Las Vegas fin 2007, il a été condamné fin 2008 à 15 ans de prison ferme pour enlèvement et vol à main armé.

    Quand à Ségo, elle touche le fond, c’est la Ségogolitude qui la frappe.
    Elle va dépasser Bush fils dans les âneries proférées sur la place publique. Je lui conseille de prendre Eve Angeli comme conseillère !
    A quand un site web dédié à ses interventions ? On a bien déja un site dédié à JCVD (http://www.affiliation-livres.com/Jean%20Claude%20Van%20Damme.zip) et Chuck Norris…

    Commentaire by bilbothobbit — 21 janvier 2009 #

  2. Disons, pour faire simple qu’il suffit de comparer l’évolution de l’Afrique du Sud et du Zimbabwe voisin et comparable depuis la création de celui-ci jusqu’à l’accession au pouvoir de Mandela. Cela me permet de qualifier, par contraste, le pouvoir sud-africain de compétent et le zimbabwéen d’incompétent. Cela n’entraîne pas un jugement positif sur d’autres aspects de ce pouvoir, qualifié dans l’article de raciste et ségrégationniste.
    Dire que les Etats-Unis sont un pays où fleurissent la diversité et le métissage est tout à fait exact, mais il n’en demeure pas moins aujourd’hui que nul ne peut être élu contre l’électorat blanc, encore et de loin la plus grande communauté ethnique. Lequel électorat blanc semble n’avoir pas eu de « problème » avec la non-blancheur d’Obama. Youpi!
    Pour ce qui qui est de la « noirceur » d’Obama, ou, comme a dit Berlusconi, de sa « bronzitude », vous avez tout à fait raison, cher Bilbohobbit. Simplement, je ne pense pas que l’électorat blanc ait vu plus de « facilité » à voter pour un métis kenyan-américain à la peau de couleur que pour un afro-américain comme Colin Powell ou Condoleeza Rice. A ce titre, il me semble que l’élection de Barack Obama met bien un terme au monopole des blancs sur le pouvoir suprème aux Etats-Unis, et, par extension au moins conceptuelle, dans les pays occidentaux. De ce point de vue-là, re-youpi! Mais, comme je l’écris, cette médaille a un revers au moins potentiel. Obama est attendu comme le Messie par beaucoup, et ce n’est certes pas un cadeau par les temps qui courent, qui n’en sont pas non plus.
    Quant au fait que, comme vous le soulignez fort justement, O.J. Simpson ait, cette fois-ci été condamné montre que l’argument racial du complot des blancs contre le noir qui a réussi est désormais éculé et dépassé. Re-re-youpi!
    Enfin, sur quels critères vous fondez-vous pour comparer Ségolène et Jean-Claude Van Damme, la compétence ? :-)

    Commentaire by JM2 — 21 janvier 2009 #

  3. Merci pour vos réponses.
    Concernant O.J. Simpson je pense toujours que c’est bien le fait qu’il n’ait plus d’argent et non pas l’argument racial qui l’a fait condamné mais peu importe.
    Quand à ma comparaison, mes critères ne sont pas la compétence mais la grandiloquence :-)

    Commentaire by bilbothobbit — 21 janvier 2009 #

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