Passer de l’assurance à la protection

février 1, 2009 on 7:32 | In Coup de gueule, Economie, Europe, France, Incongruités, International | Commentaires fermés

De nombreuse publicités d’assureurs disent en substance:  » bien assurés, bien protégés ». Or la période actuelle montre qu’il n’en est rien. Quelques exemples simples le montrent: l’assurance-chômage ne protège en rien du chômage. Au contraire, seuls les chômeurs en bénéficient.

De même, la dernière mode en termes de finance, et la plus meurtrière comme la crise l’a montré, a été de se croire protégé parce qu’on avait souscrit une assurance sous une forme ou une autre. Cela pouvait être auprès d’un rehausseur de crédit (Fanny Mae, Freddie Mac, AIG, ou les « monoline »), ou en passant par des produits dérivés comme les maintenant funestement célèbres CDS (Credit Default Swaps). L’histoire récente a prouvé que le fait d’être assuré n’a pas protégé ceux qui croyaient l’être. Notamment parce que le supposé protecteur qui vendait sa protection n’était pas suffisamment protégé lui-même des effets de la crise.

Il y a donc eu une sorte de financiarisation de la planète, où tout était devenu assurable, puis réassurable, transférable, revendable, titrisable. De la sorte, la prise de risque était en quelque sorte exorcisée, puisqu’on était assuré de son salut (au moins financier). Le seul problème était que cette assurance tous risques n’ayant pas fait disparaître les sinistres, quand ceux-ci sont arrivés, en l’occurrence les fameux sub-primes non remboursés, on s’est rendu compte avec horreur que tout ce jeu d’assurance ne faisait que faire passer le mistigri entre de nombreuses mains, mais qu’il n’y avait pas assez d’argent dans le système financier pour absorber les dégâts.

Bref, l’heure n’est plus à l’assurance. On voit d’ailleurs ce que peuvent valoir les assurances d’un dirigeant face au tsunami financier. Ainsi les assurances de Vladimir Poutine qui déclare avec assurance que le rouble ne baissera pas. Ou pas trop. Ou pas trop vite en tout cas. Ou au moins sans causer d’inflation… Non, l’heure est à la protection.

Nicolas Sarkozy, à qui la gauche avide de slogans simplificateurs avait tenté, non sans quelque succès, de coller l’image d’un champion de la droite libérale et néo-conservatrice, disait explicitement que le rôle de l’Etat est de protéger.

Or maintenant voilà que nous sautons le pas de la protection vers le protectionnisme, ce qui n’est pas du tout la même chose. Car le protectionnisme ne protège pas. Imaginez que les Etats-Unis rendent l’importation d’acier plus onéreuse pour protéger leur sidérurgie largement dépassée. Ce faisant ils contraignent leurs trois fabricants d’automobiles à acheter un acier moins compétitif, ce qui à son tour détériorera le positionnement des voitures qu’ils offriront aux consommateurs, et encouragera les constructeurs japonais à moins produire aux Etats-Unis pour importer plus du Japon. Jusqu’au moment où l’importation des voitures elles-mêmes sera rendue plus onéreuse, et ainsi de suite.

Justement, le tout nouvellement investi Président Obama a déclaré que le plan de relance américain, d’un montant qui fait apparaître dérisoires en comparaison les mesures prises par les Européens, devrait profiter avant tout aux Américains. On ne saurait être plus clair. On ne saurait trop non plus lui en faire le reproche, car tous les autres pays ont gaillardement taillé dans les conventions internationales de libre échange dès lors que la crise a frappé. Ainsi les aides nationales aux banques ont-elles pris des tournures très différentes d’un pays à l’autre, entraînant des distorsions de concurrence manifestes. Et personne (ni Bruxelles, ni l’OMC par exemple) n’a trouvé à y redire.

Pourtant, il paraît indispensable à JusMurmurandi de rappeler que, si le protectionnisme rassure, il ne protège pas. Il ne ramènera pas la prospérité comme « au bon vieux temps ». Au contraire, toute l’histoire montre que le protectionnisme a toujours entraîné un marasme économique, et que la prospérité s’accompagne de libre-échange.

Et, dans une économie déjà gravement freinée par le double fléau de la perte de crédit et de la perte de confiance, il faut absolument éviter d’en rajouter un troisième, à savoir la perte des échanges internationaux.

Mais évidemment, il est tentant pour les dirigeants de procéder d’abord à court terme en évitant les désastres annoncés, quitte à fermer les yeux sur ceux qu’ils provoquent pour plus tard en refermant graduellement les barrières douanières.

Et que, plutôt que de chercher dans le protectionnisme une illusoire et mortifère solution, nos dirigeants feraient de travailler à restaurer un carburant de l’économie encore plus indispensable que l’argent de la finance. La rime avec finance est riche, puisqu’il s’agit de la confiance.

En d’autres termes, avoir été assurés et réassurés n’a pas marché. Être protégés ne marchera pas. Nous voulons seulement être rassurés.

Obama, le Protecteur?

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