Arnaque!

février 3, 2009 on 8:37 | In Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, La Cour des Mécomptes | Commentaires fermés

Quelquefois avoir de la mémoire n’est pas une bonne chose. Ainsi, dans le livre de George Orwell « 1984″, Big Brother a-t-il créé un Ministère de l’information qui a pour mission de désinformer. Et, pour cela, des armées de fonctionnaires réécrivent le passé pour montrer que le présent est meilleur. Ainsi tous les articles de journaux qui parlaient d’une ration de chocolat de 50 grammes sont-ils réécrits en mentionnant 30 grammes, ce qui permet de nommer « hausse » et non pas « baisse » le passage de la ration à 40 grammes. Et ceux qui refusent de se laisser ainsi laver le cerveau sont-ils traités comme des ennemis du régime, et impitoyablement brisés ou éliminés.

Oui, mais voilà, le cerveau de JusMurmurandi est dur à laver, ce qui lui vaut des souvenirs inconfortables pour certains.

Au premier semestre 2007, Nicolas Sarkozy fait sa campagne à l’élection présidentielle sur le thème de la hausse du pouvoir d’achat. Mais, dans le même temps, on observe au niveau mondial une flambée des prix des matières premières, énergie, minerais, produits agricoles. Tout cela culmine en juillet-août 2008 avec un pétrole à 147$ le baril et la promesse de fortes hausses encore à venir.

La conjoncture, déjà affaiblie en 2007, ne va pas résister à ce troisième choc pétrolier et les Français voient les prix augmenter fortement au moment où leurs revenus n’augmentent que faiblement. C’est ce qu’en anglais on appelle un squeeze, et ça fait mal. C’est d’autant plus dur à supporter qu’il n’y a pas de grain à moudre pour encaisser cette mini-flambée de l’inflation, qui va culminer à près de 4% en rythme annuel en septembre 2008. Pour tenter de faire passer la pilule amère, le Gouvernement tente de mobiliser pour obtenir pour les salariés des hausses de salaire, ou une prime transports. De même il fait passer la loi Chatel pour permettre plus de concurrence entre grande surfaces, contrairement à la succession de lois qui la limitaient (Royer, Galland, Raffarin, Jacob entre autres) pour leur plus grand profit au nom d’une hypothétique protection du petit commerce de proximité et de centre-ville.

Qu’en est-il aujourd’hui, près de un an et demie plus tard?

Les syndicats et la gauche, reflétant le sentiment de la majorité de l’opinion publique, réclament à corps et à cris des hausses de pouvoir d’achat pour aider les Français à supporter la crise. Or, entre temps, les prix des matières premières se sont effondrés, retombant plus bas qu’avant le début de leur flambée. Comme entre temps, les revenus ont continué d’augmenter, il serait facile de conclure que le pouvoir d’achat a augmenté, entre des prix qui baissent et un revenu qui croît.

Erreur! L’inflation, qui était passée de 1% à 3,8% en quinze mois, n’est repassée « qu’à » 1% depuis l’effondrement des coûts, alors qu’en toute logique elle eût du devenir négative pendant un temps au moins. JusMurmurandi veut bien admettre qu’il y a un effet retard sur l’énergie, où il est usuel de se couvrir contre les hausses possibles par des contrats ou des options appropriés. C’est ainsi que le prix du gaz facturé aux consommateurs n’a pas suivi la flambée des cours et n’a donc pas de raison de décroître aussi vite non plus. C’est ainsi que les compagnies aériennes ont souvent acheté des couvertures de prix de kérosène à des cours beaucoup plus élevés que les cours actuels, ce qui explique pourquoi il y a encore des surtaxes carburant alors que le pétrole est au plus bas.

Mais JusMurmurandi se souvient de la folle inflation des prix des produits laitiers ou de ceux des pâtes alimentaires. Une hausse de 20% était banale. On nous expliquait que le blé était poussé à la hausse par la folle croissance de la consommation d’éthanol, substitut à un pétrole devenu aussi cher que les meilleurs champagnes. Que la hausse de pouvoir d’achat des citoyens des pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) créait une hausse de la demande de lait qui dépassait la capacité de production mondiale et donc tirait les prix à la hausse. Des grandes surfaces ont déréférencé certains produits phare à grand renfort de tintamarre médiatique pour bien montrer la vigueur de leur combat contre les prix trop chers.

Aujourd’hui les prix de lait payés aux producteurs ont effacé cette hausse. L’état nul de la diffusion de l’éthanol ne pèse plus sur les cours du blé.

Pourtant, JusMurmurandi n’a nul part entendu parler de baisse de 15% du prix des yaourts, des fromages, du lait ou des pâtes. Les grandes surfaces auraient-elles oublié de communiquer sur ces très bonnes nouvelles pour les consommateurs? Ou bien n’auraient-elles pas plutôt, et les entreprises de transformation avec elles, oublié de répercuter ces baisses? On en voit pas non plus baisser les prix industriels qui avaient gonflé en raison de la hausse des prix de l’énergie et de ses dérivés (produits chimiques, matières plastiques, etc).

C’est pourquoi JusMurmurandi dit « Arnaque! »

C’est pourquoi aussi, quand les syndicats et la gauche hurlent à la baisse du pouvoir d’achat 6 mois après que la bulle ait éclaté, et quand l’inflation est retombée au-dessous du rythme de hausse des revenus, JusMurmurandi dit « Arnaque »!

Décidément, avoir de la mémoire n’est pas toujours un cadeau.

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