Défendre l’extrème-droite et le négationnisme ?

février 11, 2009 on 2:49 | In Coup de gueule, Incongruités, Insolite, International | 2 Comments

Il y a des moments où le monde marche sur la tête, ce qui oblige à faire les pieds au mur pour l’avoir (la tête) à l’endroit. Ce qui rappelle le monde loufoque des Shadoks, avec ses escaliers pour descendre distincts de ses escaliers pour monter, ce qui valait un sort funeste à ceux qui s’essayaient à monter un escalier fait pour descendre ou à descendre un escalier propre à la montée.

Deux faits ont attiré l’attention de JusMurmurandi, qui requièrent pareille gymnastique.

L’un est la désexcommunication par l’Eglise catholique de Mgr Williamson, évèque ordonné dans la fraternité de Saint Pie V, lefèbvriste et très traditionnaliste. Le choeur des voix qui se sont élevées contre cette désexcommunication et ont vilipendé le pape a étouffé toute forme d’argumentation sous une menace d’excommunication pour « complaisance avec le négationnisme ». Pourtant il semble clair à Jusmurmurandi que le pape n’avait pas à tenir compte des idées négationnistes du lamentable évêque dans sa décision, mais uniquement d’aspects théologiques. Lesquels ne concernent pas JusMurmurandi. En effet, l’Eglise catholique, pas plus qu’une autre d’ailleurs, n’a pas pour mission de veiller au politiquement correct de ses ouailles, ni d’excommunier ceux qui, comme Williamson, se vautrent dans le nauséabond et l’ignoble. Il y a d’autres instances pour cela.

En France, les déclarations épiscopales auraient valu à leur auteur une comparution et une condamnation en correctionnelle. Elles sont également illégales en Allemagne. Et c’est très bien comme cela. Mais ce n’est pas là affaire d’Eglise. Sinon, que faites-vous de la laïcité? Si l’Eglise excommuniait pour cause d’illégalité, on serait en plein mélange de genres. En revanche, il appartient aux supérieurs ecclésiastiques de l’évêque perdu de veiller à ce qu’il ne puisse utiliser sa mitre pour propager son bien curieux catéchisme. Ce que et Rome et la Fraternité Saint Pie V ont fini par faire. Et les choses devraient en rester là.

On peut appartenir à une Eglise dès lors qu’on a une foi compatible avec celle-ci. Ce qui n’est pas la même chose qu’être bien-pensant. Il semble d’ailleurs bien que ne ne soyons plus qu’un monde de bien-pensants, alors même que de moins en moins de gens ont, dans les pays occidentaux, la foi.

L’autre fait est l’interdiction faite à un député d’extrême-droite néerlandais, Geert Wilders, de se rendre en Grande-Bretagne pour y projeter son film violemment anti-islam « fitna ». La thèse principale de ce film de 15 minutes est qu’il faut interdire le Coran qui serait une œuvre fasciste. Le motif invoqué par les autorités Britanniques pour refuser la venu de M. Wilders, pourtant parlementaire d’un pays de l’Union Européenne, est le trouble à l’ordre public. Et la privation de la liberté de circuler, de la liberté de parole, et de la liberté d’opinion, est-ce que cette privation ne trouble ni l’ordre public ni les consciences?

Outre le fait qu’elles sont contre-vérité et illégales, les thèses négationnistes de Williamson sont exécrables. Cela ne veut pas dire qu’il faille le rôtir, et à petit feu s’il vous plaît, en place publique ni l’excommunier.
Les thèses d’exécration du Coran de Geert Wilders sont aussi totalement choquantes. Lui non plus n’a pas pour autant mérité d’être assigné à résidence comme l’opposante birmane Aung San Su Kyi, dont le sort indigne les consciences occidentales. Mais pas plus.

Il est évidemment plus facile, plus sûr, plus payant de soutenir ces cas où le politiquement correct côtoie la bonne cause et le principe moral.

C’est justement à l’endroit où la pensée est dévoyée que le principe moral doit être affirmé avec force, faute de quoi il ne sera plus qu’un alibi de ce qui pourrait bien devenir un nouveau maccarthisme/fascisme/soviétisme/intégrisme et tous autres mots en « isme ».

Et dont le contraire s’appelle…. « liberté ».

2 commentaires

  1. Une excommunication dans le droit canon, ne signifie pas une réintégration au sein de l’Eglise. On s’autorise à ouvrir le dialogue avec ceux qui le désirent, ce qui manifestement n’était pas le cas de ce M. Williamson. Tant mieux pour lui et pour nous.

    Autre rappel intéressant : l’origine de la loi qui interdit de désigner des évêques sans l’accord du pape, servait à lutter à l’époque en fait contre l’avènement des prêtres communistes. De ça aussi, nos médias n’étaient pas très friand de le révéler.

    Et toujours sur la même question, je remarque que lorsque l’Église prône l’abstinence, dénonce l’avortement ou l’euthanasie tout le monde s’empresse de lui répondre qu’elle n’a rien à dire sur la place publique, que ça ne regarde que ses fidèles (et encore…). Là en revanche, ils ne se prient pas, si je puis dire, pour lui quémander de se mettre au diapason du politiquement correct.
    En voila une drôle de religion, pour le coup.

    Commentaire by Thomas — 11 février 2009 #

  2. Quoique l’opinion publique ait largement perçu la désexcommunication comme une réintégration, en toute rigueur, vous avez raison, cher Thomas, et j’ai modifié l’article pour tenir compte de votre commentaire.
    Je suis aussi tout à fait d’accord avec votre commentaire sur l’ambivalence de ce que l’on attend comme message de l’Eglise catholique aujourd’hui. Spirituel « seulement », ou plus largement sociétal? C’est, à mon avis, là qu’on voit un échec à communiquer de cette Eglise: on ne sait plus ce qu’on doit en attendre.

    Commentaire by JM2 — 12 février 2009 #

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