Le triomphe du marché

février 19, 2009 on 8:55 | In Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, Insolite, International | Commentaires fermés

Il est des ironies cruelles. A l’heure où les anti-libéraux, anti-marchés et autres partisans de l’économie régulée ont des arguments pour démontrer que « l’économie de marché, ça ne marche pas », JusMurmurandi pose une question simple.

Dans tous les pays gros producteurs d’automobiles, cette industrie est sinistrée. Pour le moment, les Etats mettent les producteurs sous perfusion d’argent public. General Motors consomme 2 milliards de cash par mois, et le montant requis pour lui permettre, ainsi qu’à son concurrent Chrysler, de survivre ne cesse d’enfler. Histoire de dire que ce n’est pas du qu’à l’ineptie de ces constructeurs, à l’asthénie du système bancaire américain, ou à l’état de dépression de ce marché, Nissan, constructeur ayant affiché la plus forte marge bénéficiaire mondiale, cherche une injection de fonds de 20 milliards de dollars.

Quand ce n’est plus seulement le cancre, mais toute la classe, y compris les meilleurs élèves, qui sont en grave difficulté, peut-être est-il temps de remettre en cause le programme. Or, justement, pour cause de pollution et de réchauffement climatique, de renchérissement et de raréfaction du pétrole, la fin de la civilisation de l’automobile avait été programmée.

Le problème, c’est que quand une conjoncture d’une violence extrême et inattendue dévaste cette industrie, subitement tous se réveillent pour se rappeler le nombre considérable de personnes qu’elle fait vivre. Ainsi l’Allemagne, pays si soucieux d’environnement qu’il a voté il y a des années déjà sa sortie du nucléaire, accorde une aide de 2500€ par voiture vendue, c’est-à-dire achetée.

Le problème, c’est que les aides d’Etat ne font rien pour régler le problème. Tout au plus le reportent-elles en permettant aux constructeurs de passer une échéance, puis une autre, puis encore une. En attendant une hypothétique reprise, après laquelle tous espèrent que « cela redeviendra comme avant ». Pire encore, les aides sont assorties de conditions qui minimisent l’impact social des mesures prises par les constructeurs pour se restructurer, ce qui retarde leur inévitable adaptation à un monde qui aurait effectivement, au moins pour sa partie occidentalo-développée, mis à terme à son histoire d’amour avec la bagnole.

Complément d’ironie, cette crise des achats automobiles a été déclenchée par la hausse vertigineuse du coût des carburants, hausse qui appartient maintenant à un passé qui paraît bien lointain. Mais la baisse des prix n’a pas fait repartir la demande, qui, ces derniers mois aux USA situe le volume du marché quelques 50 ans en arrière. Ce qui vaut aussi au Japon une baisse vertigineuse de son PNB du 4e trimestre, à -12,7%, entraînée par une baisse des exportations de 45%!

C’est pourquoi JusMurmurandi observe que ceux qui théorisent sur le retour de l’Etat face aux marchés ont peut-être raison en parlant des marchés financiers. Encore qu’il faudrait se demander si les montants gigantesques de capitaux investis et garantis par les pouvoirs publics ont jusqu’ici relancé les activités de crédit, ce qui n’apparaît pour le moins pas évident aux Etats-unis notamment.

Mais il est un maître que même les Etats ne peuvent faire plier, c’est le marché. Si les consommateurs continuent de refuser de consommer et préfèrent, comme actuellement, se désendetter et épargner, il n’y a pas grand chose que les Etats y puissent. Le Japon qui a vécu 20 ans de récession/stagnation malgré de nombreux plans de relance coûteux aurait pu servir d’exemple.

Le problème le plus aigu est donc de trouver une réponse efficace à la question « comment faire boire un animal qui n’a pas soif? » Car, comme le sait la sagesse populaire, « on peut mener son cheval au puits, on ne peut pas le forcer à boire. »

C’est la faiblesse de tous les plans de relance de la consommation, à savoir que les sommes distribuées ne seront pas dépensées, mais épargnées, et ne contribueront pas à la relance tant désirée. C’est donc jeter de l’argent dans un puits sans fond.

JusMurmurandi note avec intérêt qu’il y a eu une proposition originale pour tenter de sortir en force de cette situation. C’était de donner non pas de l’argent, mais des bons de consommation, qu’il s’agisse de produits alimentaires ou de chèques services. Quelle situation abrancadabrantesque quand il faut forcer les gens à consommer. Quelle leçon pour ceux qui n’aiment pas le marché!

Si l’Etat, en bonne logique, est conduit par ce qui précède à distribuer des voitures à ceux qui veulent, JusMurmurandi tient à faire preuve de civisme et acecptera sans barguigner d’être parmi les premiers à participer à ce programme!

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