Banques et automobiles, même combat?

février 23, 2009 on 2:08 | In Economie, France, Incongruités, International | 2 Comments

Les chiffres record s’accumulent avec cette crise véritablement sans précédent. Quelques uns illustrent l’état de confusion et de délabrement du système économico-financier mondial.

En janvier, le premier marché automobile au monde était…la Chine. Les marchés américain et japonais, effondrés, ont cédé le pas. Ce qui rend la situation véritablement intéressante, parce que le marché chinois est en pleine transition entre une part de marché étrangère de 100% au départ (dominé par Volkswagen, GM et les japonais), et une part de marché croissante de constructeurs chinois inconnus hier, et qui, aujourd’hui, visent aussi l’exportation.

Plus symbolique encore, le cas de Citigroup, hier premier groupe financier mondial. Son action est tombée la semaine dernière en dessous de 2 dollars, donnant à l’ensemble une capitalisation boursière de moins de un milliard de dollars. Moins de un milliard de dollars, c’est à dire moins que rien pour un groupe de cette taille. Moins de 5% de celle de BNP-Paribas par exemple, qui n’a pourtant pas été épargnée par la crise, ayant perdu les 3/4 de sa valeur en moins de 2 ans. Tandis que Citigroup a perdu plus de 95% de la sienne. L’exemple qui vient à l’esprit pour un tel effondrement d’un géant autrefois dominateur est, bien sûr, General Motors. Ce qui nous ramène tout droit au marché automobile. Comme nous y ramène aussi le fait que deux des trois métiers les plus sinistrés par la crise sont l’automobile et la banque. L’un et l’autre sont également liés par le fait qu’il faut que les banques fonctionnent pour que les consommateurs puissent acheter à crédit des automobiles.

Ce qui oblige à poser cette question quelque peu curieuse: la banque est-elle l’automobile des années 2000?

Par beaucoup de côtés, oui. Les pays occidentaux, anglo-saxons en particulier, avaient largement accepté le déclin de leur industrie manufacturière, automobile en particulier, en contrepartie du développement de leurs métiers de services, services financiers en particulier. Ce qui faisait de Citigroup le successeur naturel de General Motors au firmament de la toute-puissance économique américaine. Et les Américains n’ont eu de cesse, dans les négociations de l’OMC, de marchander l’ouverture de leur marché aux produits d’autres pays en contrepartie de l’ouverture de ces pays aux services financiers américains.

Un court retour en arrière rappelle que l’industrie manufacturière américaine traditionnelle a déjà cru connaître une manière de successeur sous la forme de la high-tech des années 90. Intel et Microsoft devaient être les nouveaux champions planétaires de l’Oncle Sam, et Bill Gates était l’homme le plus riche du monde année après année. On sait comment a fini cette formidable émergence, avec l’éclatement de la bulle Internet en 2000/2001.

Ce qui est plus curieux est que, dans de multiples cas, la menace -ou bien est-ce une promesse?- de nationalisation d’une banque a eu pour effet de faire remonter son cours de bourse, en montrant que l’Etat était prêt à garantir la survie de la banque. or l’action de Citigroup ne cesse de baisser à chaque discussion d’une possible nationalisation, alors que celle de GM monte et baisse dans les cas inverses.

Toujours est-il qu’il est clair que les Etats-unis ne répèteront pas l’erreur ruineuse qui a consisté à laisser tomber Lehman Brothers, ce qui permet à Citigoup, et à son concurrent Bank of America, atteint du même syndrome quoiqu’à un moindre degré, de poursuivre leur activité sans trop craindre un exode des clients. Mais que, si on évoque le dépôt de bilan de GM et Chrysler comme possible, voire même probable, personne ne se hasarde à envisager leur antionhalisation. C’est-à-dire là encore l’inverse de Citigroup ou Bank of America.

En attendant, si le monde commence à savoir penser une forme d’existence où la voiture à moteur à combustion interne d’hydrocarbures fossiles ne serait plus omnipotente, nous n’en en sommes pas, même de très loin, à commencer à imaginer un monde sans banques ni épargne ni crédit…

A un autre niveau, une fois de plus, une simple comparaison montre que la France ne s’en sort pas si mal face à ses concurrent anglo-saxons, que ce soit au niveau des banques, des fabricants d’automobiles ou du déficit budgétaire, ou encore de l’immobilier. De nombreux média de ces pays titrent d’ailleurs sur l’excellence du « modèle français » mixte État-marché.

On pourrait en déduire que Nicolas Sarkozy recueillerait les justes fruits de cette moindre dureté des temps en termes de popularité.

Ce serait supposer que les Français soient (1) économiquement alphabétisés, (2) aussi prompts à louer qu’à critiquer et (3) rationnels plutôt que passionnels

Finalement, de même que certaines entreprises doivent se réjouir aujourd’hui d’avoir perdu certaines batailles en 2007, comme Barclay’s qui a laissé son concurrent anglais RBS racheter la banque néerlandaise ABN-AMRO, achat qui l’a coulé, ou comme Michaïl Prokhorov qui a perdu la bataille du nickel contre deux autres oligarques russes et à été contraint de leur vendre ses actions contre cash juste avant l’effondrement de leur valeur, ce qui a ruiné les « gagnants », un voyage de Ségolène Royal est comme un long fleuve tranquille par rapport à tout déplacement de Nicolas Sarkozy.

Cela donnerait un tout nouveau sens à sa défaite et à la victoire de NS si tous deux avaient su à l’avance que gagner ce jour-là, c’était embarquer comme capitaine de paquebot quand rugissent les vagues géantes et soufflent les typhons.

On peut se demander aussi ce que pense François Pérol, aujourd’hui chargé des questions économiques au cabinet de Sarkozy et qui sera demain le patron de la fusion Banques Populaires-Caisses d’Epargne, toutes deux en grande difficulté notamment du fait de leur filiale commune, Natixis. Qu’ayant connu la peste, il est maintenant mûr pour lutter contre le choléra?

2 commentaires

  1. Selon l’AFP Nicolas Sarkozy a rendu hommage mardi, à l’issue d’un déjeuner à Londres avec Tony Blair, au « pragmatisme » et à « l’ouverture » du Premier ministre britannique. « Je veux construire le meilleur pour la France, je veux aller rencontrer partout dans le monde ceux qui ont bien servi leur pays, qui ont été utiles à leur pays », a commenté M. Sarkozy en sortant du 10 Downing street, raccompagné par M. Blair après une rencontre d’une heure. « Il y a une grande confiance entre Tony Blair et moi », a-t-il affirmé alors que le dirigeant travailliste est très critiqué par la gauche française. Nicolas dont Londres était le premier déplacement à l’étranger depuis qu’il a annoncé sa candidature à la présidentielle, a salué « la façon dont Tony Blair conduit sa politique », en citant « la résolution du problème irlandais, le plein-emploi, la modernisation du pays ».

    « Il ne s’agit pas de plaquer un modèle » sur le cas français « mais Tony Blair a fait preuve de pragmatisme et a été utile à son pays et je veux une France très ouverte sur le monde. Un de nos problèmes, c’est qu’on est trop centrés sur nous-mêmes », a poursuivi N. Sarkozy.
    « On a évidemment des désaccords, par exemple l’affaire de l’Irak », dans laquelle Paris, contrairement à Londres, n’a pas rejoint la coalition menée par George Bush, a tempéré M. Sarkozy. Mais « il m’a appris que le pragmatisme et l’ouverture, en politique, ça compte », a assuré le ministre-candidat.

    C’est vrai qu’on voit moins Tony Blair au meeting de l’UMP depuis un moment … une coincidence surement.

    Commentaire by Biloute — 24 février 2009 #

  2. Désolé, cher(e) Biloute, peut-être est-ce l’heure tardive, mais je ne vois pas ce que votre citation de la rencontre Blair-Sarko essaye de nous dire? Éclaireriez-vous notre lanterne?

    Commentaire by JM2 — 24 février 2009 #

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