Piège à Colonna

mars 28, 2009 on 2:07 | In France, Incongruités, Insolite | Commentaires fermés

Le procès en appel d’Yvan Colonna est terminé, et la condamnation est tombée. Comme au premier procès, il a été jugé coupable du meurtre du préfet Erignac.

Évidemment, JusMurmurandi n’a pas d’information particulière, secrète, déterminante, sur cet assassinat, ni sur les procès qui s’en sont suivis. Mais les stratégies qui se sont déployées sont très intéressantes.

Au premier procès, Colonna et ses avocats tentent sa chance (je sais, on devrait dire « tentent leur chance », mais en fait, seul Colonna pâtit d’un échec), et se battent sur le fond, et perdent. Au second procès, ils optent pour discréditer l’enquête, l’accusation, les témoins, bref, pour gripper la machine judiciaire. Parlant de témoins justement, une étrange épidémie les frappe, qui les « empêche » de venir témoigner, quand elle ne leur fait pas perdre la mémoire.

Le problème, c’est la géométrie de cette affaire. L’accusation repose sur les témoignages des complices de Colonna et de leurs compagnes, qui l’ont dénoncé comme le tireur. Ce qui est déjà un fait pour le moins rare en Corse, où dénoncer est considéré, comme chez les truands, et a fortiori chez les truands corses, comme contraire à l’honneur.

Et on peut se demander pourquoi cette dénonciation, si Colonna n’est pas coupable. La pression de la police pendant les gardes à vue? Si cela suffisait pour faire craquer les indépendantistes, cela se saurait, or c’est l’inverse qui est vrai.

Il y a 3 possibilités. Soit Colonna est coupable, et justice est rendue. Soit il est innocent, et la police l’a chargé en forçant les aveux des complices pour trouver à toute force un coupable. Mais alors, pourquoi ces complices, tous amis et camarades de Colonna, l’ont ils laissé jeter dans les geôles de l’Etat même après avoir écopé du maximum? Soit il est innocent, et les complices l’ont dénoncé pour protéger le ou les vrais coupables.

De toute façon, d’honneur dans cette affaire, il n’y a pas trace. C’est une histoire d’hommes perdus dans un combat où ils voient la violence comme seule issue à des revendications minoritaires et dont les chefs sont bien souvent les bénéficiaires sonnants et trébuchants, rendant la différence entre combat pour l’indépendance et grand banditisme indistincte.

Mais revenons à Yvan Colonna. Au cours du procès, tout au moins de la partie à laquelle il a daigné assister, il a demandé désespérément à un de ses complices de l’innocenter pour qu’il sauve sa vie. C’est là qu’est la vérité de ce procès. Colonna a été dénoncé, largué, balancé par les siens. Lui, qui, peut-être, se croyait un idéal et des solidarités indéfectibles, se retrouve relégué au rôle de dégât collatéral.

Que ce soit pour protéger les leurs, ou un autre, ou d’autres, soit Colonna est coupable, soit il ne l’est pas, mais c’est alors toute la bande de terroristes-indépendantistes autour de lui qui est coupable de l’avoir condamné à perpétuité. La police ne jouant que le rôle qui est traditionnellement le sien, de diviser pour confondre.

En quelque sorte, Colonna est coupable de toute façon. Soit du meurtre. Soit, s’il ne l’est pas, de s’être associé à de parfaites ordures qui lui ont fait porter le chapeau d’un autre. Et c’est peut-être ce qui expliquerait que Colonna se soit retiré d’un procès qu’il savait joué d’avance. Non pas à cause de manipulations policières, qui ne portent, si elles existent, pas habituellement de tels fruits, et qui font partie du jeu, mais du comportement de ses ex-associés es-indépendance, qui ne lui ont laissé aucune chance alors qu’il les pensait ses indéfectibles alliés.

Tout au plus, au fond de sa cellule, Yvan Colonna aura-t-il la satisfaction de pouvoir se prétendre victime d’une justice aux ordres, d’une conspiration d’État, d’un déni de justice égal à celui du capitaine Dreyfus, d’une exécution judiciaire en règle qui fait de lui une nouvelle Jeanne d’Arc.

Décidément, l’époque des bandits d’honneur est bien loin. Pour la partie honneur en tout cas. On passe dans l’Histoire comme on peut…

Yvan Colonna

No Comments yet

Désolé, les commentaires sont fermés pour le moment.