Le caniche?

avril 13, 2009 on 12:53 | In Best of, Coup de gueule, France, Incongruités, International, Poil à gratter | Commentaires fermés

Vous vous en souvenez peut-être, Tony Blair, le charismatique Premier Ministre britannique était accusé de n’être « que » le caniche de George Bush, compte tenu qu’il suivait toutes les initiatives du Président américain, jusques et y compris l’attaque de l’Irak sur des bases totalement fallacieuses (les fameuses armes de destruction massive que Saddam Hussein était accusé de posséder).

Voilà maintenant que Nicolas Sarkozy est accusé d’être le larbin des Américains parce qu’il a réintégré la France au commandement intégré de l’OTAN. Ce ne serait qu’un épisode banal de l’opposition systématique d’un PS qui est prêt à tout lors qu’une opportunité se présente de critiquer le Président, si ne se joignaient à ces protestations celles d’une partie de la majorité.

Notamment ceux qui se considèrent comme des Gaullistes historiques rappellent à l’envi que l’action présidentielle inverse la décision du Général de sortir de cette instance de l’OTAN. Dominique de Villepin, notamment, ne rate pas, lui non plus, cette occasion de tenter de tailler des croupières au Chef de l’Etat.

Au PS, JusMurmurandi remet en mémoire le rôle central et déterminant du soutien du Président Mitterrand au déploiement de missiles américains Cruise en Europe pour faire pièce aux SS20 soviétiques. Sans notamment un discours historique au Bundestag, il n’est pas sûr que l’aval allemand eût été obtenu et le déploiement effectué. La chute de l’Union Soviétique et la fin de la Guerre Froide eussent peut-être pris un autre tournant. Faut-il pour autant dire que Mitterrand a été le caniche des Américains, présidés à l’époque par un Ronald Reagan avec qui le Président français ne partageait pas grand chose?

Aux opposants systématiques de son propre parti, JusMurmurandi rappelle que la question du commandement intégré de l’OTAN à l’époque du Général de Gaulle tournait autour de l’indépendance nucléaire française. Sans en sortir, la France eût été dépourvue de toute force nucléaire indépendante, comme la Grande-Bretagne l’est. Incapable de déclencher le feu nucléaire sans l’aval des Américains, mais engagée dès lors que les Américains l’auraient décidé. Telle n’est plus la situation aujourd’hui, où, grâce au Général de Gaulle justement, la France est indépendante sur ce plan là et le restera. Quand à l’argument prédisant que la France sera obligée de participer à toutes les initiatives américaines quelles qu’elles soient, et donc eût été contrainte de guerroyer en Irak, c’est purement et simplement un mensonge. L’Allemagne est membre de toutes les instances de l’OTAN et n’a pas participé à la seconde guerre d’Irak, ni à l’occupation.

Plus intéressant encore, une tribune du Monde qui fait le lien avec l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, adhésion souhaitée publiquement par Barack Obama et refusée par Nicolas Sarkozy. Là encore, les anti-sarkozystes primaires, ce qui fait autant de monde que la ligne A du RER aux heures de pointe, s’engouffrent dans ce qu’ils croient être une nouvelle brèche pour traiter le Président de caniche des Américains. Comme il leur aura cédé sur l’OTAN (c’est leur version des faits), il ne pourra longtemps leur résister dans l’affaire turque. Sauf que, manque de chance pour eux, et notamment pour Dominique de Villepin, qui, lui, est bel et bien le caniche de Chirac, son maître est partisan de l’adhésion turque pour ancrer ce pays à l’Occident. Le problème insoluble qui leur est posé est de faire passer cette attitude pro-turque pour du gaullisme historique. Alors que De Gaulle a, à lui seul, torpillé l’entrée de la Grande-Bretagne pour ne pas réduire la vitesse de progression de l’Europe en la diluant avec un pays pas assez européen.

Parce que, dans cette affaire, c’est bel et bien Nicolas Sarkozy qui est gaulliste. Imagine-t-on le Général accepter la Turquie en Europe? Pas une seconde!

Il est d’ailleurs légitime de se demander si le Président a été si non-gaulliste que cela en rentrant dans le commandement intégré de l’OTAN. Car le fait est que les forces militaires françaises sont sans le sou. Écartelées entre des systèmes d’armes de prestige imposés pour des raisons tenant plus à l’industrie française et à un modèle de conflit de la guerre froide qu’aux réalités modernes, une professionnalisation dont les moyens financiers ne lui ont pas été donnés et un budget en berne depuis des années. Le char Leclerc, le Rafale, les beaux restes du porte avions Charles de Gaulle (!), autant de systèmes d’armes hors de prix qui montrent par leur singulier échec à l’exportation à quel point l’armée française n’en a pas eu pour son argent, pourtant déjà chichement compté.

Donc, quand on n’a pas les moyens de sa politique, il vaut mieux avoir la politique de ses moyens. Une maxime auquel un pragmatique comme le Général de Gaulle aurait pu souscrire. Et, parce ce que c’était lui, personne n’aurait osé suggéré que, ce faisant, il capitulait. Ni qu’il était le caniche de qui que ce soit…

Homme politique français?

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