Des bonus à toute épreuve

juillet 16, 2009 on 6:53 | In Coup de gueule, Economie, Incongruités, International, Poil à gratter | Commentaires fermés

Incroyable! Alors que la crise bat son plein, une banque américaine, et pas n’importe laquelle, annonce des profits record pour le deuxième trimestre de l’année 2009. Goldman Sachs, la première banque d’affaires au monde.

Il y a déjà quelque chose de choquant à voir de tels profits affichés en si absolu décalage avec la conjoncture. Manifestement, les activités de Goldman Sachs ont été facturées avec une marge bénéficiaire très importante, de façon à laisser un tel profit en bas du compte d’exploitation.

Mais comment facturer de telles marges quand la conjoncture est déprimée et les affaires rares? Pourquoi la concurrence ne mord-elle pas sur la clientèle de Goldman Sachs?

Il faut se souvenir que, dans les activités de trading, le rival N°1 de GS était Lehman Brothers. Que Lehman a rencontré de graves difficultés en octobre 2008, comme la plupart des banques mondiales. Et que, si l’Etat fédéral américain a décidé de sauver Merril Lynch ou AIG, il a décidé de laisser couler Lehman, provoquant par réaction une tornade sur un marché financier déjà sinistré.

Laquelle tornade a menacé d’entraîner toutes les autres banques mondiales dans une spirale infernale de défiance et d’emporter le système financier planétaire. Et que, pour la stopper, tous les États mondiaux ont ouvert des lignes de crédit quasi-illimitées à leurs banques, y compris à la toute-puissante Goldman Sachs. Lesquelles banques, se trouvant sous perfusion d’argent public se sont trouvées aussi quelque peu sous tutelle, notamment pour la délicate question de super-ultra-méga bonus pour leurs employés chéris.

Car, JusMurmurandi s’en souvient, de nombreux établissements que leurs errements eussent conduits à la faillite n’était l’intervention des contribuables pour les sauver sous forme d’argent public voulaient quand même verser de tels bonus au titre de 2008, l’année de toutes les calamités.

Moyennant quoi, certaines banques américaines ont tenu à rembourser au plus vite les aides de l’Oncle Sam. Ce qui a comme conséquence de lever aussi la tutelle financière qui les empêche de payer ce qu’elles veulent à qui elles veulent.

Et, de fait, Goldman Sachs a publié dans ses comptes une mise en réserve de 11 milliards de dollars pour des bonus à venir au titre de 2009. Une année qu’elle n’aurait pas vu arriver sans aide publique. 11 milliards de dollars, soit plus que le PNB de nombreux petits pays, rien qu’au titre des rémunérations variables…

Ce qui se traduit par le fait que, chez Goldman, le revenu moyen tous employés confondus, dépasse 400.000$ par an…

11 milliards de dollars dans une économie en pleine crise, donc loin, très loin de ce qui sera versé, n’en doutons pas, quand l’économie se sera redressée.

Petit détail. L’homme qui, en tant que Secrétaire au Trésor américain a décidé de laisser couler Lehman, le concurrent de Goldman Sachs, s’appelle Henry Paulson. Son poste avant de rejoindre l’administration Bush? Vous l’avez deviné. Il dirigeait Goldman Sachs.

Décidément, les promesses de l’administration Obama de contribuer à réformer les marchés et leurs acteurs pour éviter le renouvellement d’une calamité économique comme celle que nous vivons, et qui est largement, ne l’oublions pas, causée par une orgie de risques pris par les banques menées par des banquiers poussés par une envie sans limite de gagner toujours plus semblent de plus en plus de pieuses mais creuses paroles.

Les bonus quand tout va bien, et l’argent du contribuable pour s’en sortir quand on a trop perdu, vraiment le sort est plus clément pour les banques américaines (Goldman est l’exemple le plus choquant, mais Bank of America, Citigroup ou Morgan Stanley font de même) que pour de nombreuses PME ou familles endettées qui se retrouvent avec rien.

Parlant de PME, la société américaine de crédit CIT, spécialisée dans le crédit aux PME du commerce, va couler, l’administration Obama lui ayant refusé son aide. La sixième plus grosse faillite de l’Histoire américaine s’annonce et CIT va rejoindre Lehman au cimetière des géants de la finance. C’est à se demander si Goldman Sachs ne va pas s’intéresser maintenant au crédit aux PME américaines.

Clausewitz disait que la politique est la continuation de la guerre par d’autre moyens. JusMurmurandi se dit que la finance américaine, c’est la poursuite des profits et des bonus par tous les moyens…

No Comments yet

Désolé, les commentaires sont fermés pour le moment.