Indigeste!

juillet 18, 2009 on 7:17 | In Best of, Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, La Cour des Mécomptes, Poil à gratter | Commentaires fermés

JusMurmurandi l’avait annoncé, et c’est devenu réalité. La baisse de la T.V.A.consentie aux cafetiers et restaurateurs suivant la promesse de l’ancien Président Jaques Chirac a fait ses preuves. Moins d’un établissement sur 3 tient les engagements pris par la profession de répercuter cette baisse, même de façon très sélective, aux clients.

Au départ, les restaurateurs, chers au cœur de ce grand gourmand de Président, lui font savoir que le différentiel de TVA en faveur de la restauration rapide par rapport à la restauration traditionnelle pousse les Français à déserter leurs tables en faveur des sandwiches et autres formes de malbouffe, et coûte des emplois.

Sensible à cet argument, Chirac promet, mais ne peut tenir vu son manque de poids à Bruxelles. Et la profession de le tenir sans cesse comptable de cet échec, partiellement compensé -déjà- par des baisses de charges.

C’est Sarkozy qui va tenir la promesse de Chirac, au nom de la continuité de l’Etat, pour ne pas se ridiculiser à Bruxelles, et pour montrer que lui sait non seulement promettre, comme son prédécesseur, mais aussi livrer.

Sauf qu’entre temps la profession a changé de chanson. Il ne s’agit plus de créer des emplois, ou si peu, pour contrer la restauration rapide, mais de pouvoir mieux payer ses employés, notoirement mal rémunérés, ce qui laisse des offres d’emplois insatisfaites, et rend donc des offres supplémentaires vaines.

En plus, arrive la crise qui met à mal les caisses des restaurateurs et cafetiers comme celles de presque toutes les entreprises françaises. Oui, mais voilà, la baisse de la TVA va passer par là.

La profession négocie donc a minima la création de 20.000 emplois supplémentaires (il y en aurait eu de toute façon 20.000, donc le chiffre de 40.000 n’est qu’un attrape-couillons) et la baisse a minima des prix, sur seulement 7 articles. Qu’on compte combien il y a de boissons sur la carte d’un cafetier, ou de plats sur celle d’un restaurateur, et chacun verra comment baisser les prix sur 7 articles est totalement dérisoire, ou symbolique.

Plus trace de nouvelle convention collective qui viendrait contraindre, si peu que ce soit, la profession à mieux payer ses employés, qui sont laissés aux bons soins de leurs employeurs. Bons soins dont on sait déjà qu’il sont fort pingres.

Le reste, c’est bien simple, va directement dans la poche des cafetiers et restaurateurs.

Le résultat, c’est une aide de l’Etat, encore une, qui n’aura d’autre effet que de ruiner un peu plus les finances publiques, et de charger la mule des contribuables, qui n’en peuvent déjà plus.

Malheureusement, pour symbolique que soit cet épisode, ce n’est pas une exception, c’est au contraire la règle. En 1993, l’État ouvre le chapitre des aides aux entreprises sur les bas salaires. Elle coûte à l’époque moins de 3 milliards de francs. 16 ans plus tard, le même poste coûte, toutes aides et franchises de charges confondues, 30 milliards d’euros par an.

Évidemment le patronat reste dans son rôle en affirmant (menaçant?) que 800.000 emplois disparaîtraient si ces aides étaient supprimées. Même si c’était vrai, et non un chiffre aussi truqué que celui des manifestants donné par les centrales syndicales, cela fait quand même 40.000€ d’aide par emploi et par an, soit beaucoup plus que la totalité de la masse salariale de ces 800.000 emplois.

Ce qui montre à quel point il serait « rentable » de supprimer toutes ces aides.

Oui mais voilà, nous sommes en France. Comme aux États-Unis, où l’Administration Obama semble laisser ses promesses de réforme du système financier à l’état de projet pour ne surtout pas empêcher les banques de se refaire une santé en faisant exactement comme avant la crise -méga-risques et giga-bonus-, les promesses de Sarkozy de baisser les dépenses de l’Etat ne sont tenues qu’à dose homéopathique.

Et c’est aux Français qu’un jour il faudra bien présenter l’addition de toutes ces folies dispendieuses. A n’en pas douter, ils en auront une sérieuse indigestion. Et feront ce que fait tout client qui ne digère pas le repas qu’on vient de lui servir.

Ils changeront de crèmerie.

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