Vous avez dit précaution?

août 10, 2009 on 3:42 | In Coup de gueule, France, Incongruités, Poil à gratter | Commentaires fermés

La grippe porcine est une pandémie comme le monde n’en a jamais connue. Elle se répand à une vitesse sans précédent, et les prévisions affirment qu’il se pourrait bien que la moitié de l’humanité ait été contaminée d’ici à son extinction. Jusqu’ici, elle n’est que peu dangereuse, et pour l’essentiel, que pour des personnes déjà fragilisées. Mais la possibilité que le virus mute vers une forme plus « agressive » fait revenir à la conscience du monde la peur des grandes pestes, qui tuaient des dizaines de pour cent d’une population.

C’est pourquoi les gouvernements occidentaux se sont rués pour acheter des dizaines de millions de doses de médicaments et de vaccins, dès avant leur commercialisation.

Mais cela ne va pas de soi. Des experts, comme le professeur Bernard Debré, ou Marc Gentilini, ancien président de la Croix Rouge, ou Michel Kazatchkine, président du fonds mondial de lutte contre le SIDA, contestent ces mesures de précaution. Notamment parce que les fonds mobilisés (un milliard d’euros pour la seule France pour 94 millions de doses de vaccin, dès qu’il sera prêt) pourraient, d’après eux, sauver beaucoup plus de vies en étant appliqués à d’autres pathologies.

Ceci révèle la singulière nocivité de ce que les politiques français, suivant le Président Jacques Chirac, ont incorporé à la Constitution: le principe de précaution.

Quand menace la pandémie, il faut se préparer, c’est la précaution. C’est aujourd’hui un impératif légal, faute duquel les politiques au pouvoir s’exposent aux mêmes poursuites que ceux qui ont eu à gérer l’affaire du sang contaminé. Dès lors qu’ il y a menace connue, il faut prendre toutes les précautions. Y compris acheter des vaccins dont on ne sait encore rien, y compris quels effets secondaires ils pourraient avoir, ni quelle sera leur efficacité, puisque, par définition, ce n’est qu’en cas de mutation que le virus sera véritablement dangereux, et que, dès lors qu’il mute, il y a des chances qu’il échappe au vaccins préparés pour affronter l’ancienne variante.

Mais, et c’est là que JusMurmurandi hoche la tête, perdu entre incompréhension et ahurissement, rien de tel n’est indispensable pour la lutte contre des maladies connues. Le cancer existe, le SIDA aussi, et toutes les autres. Il y a lieu de les combattre, bien sûr, avec les moyens disponibles. Mais ce combat qui sauve des vies au quotidien et qui pourrait en sauver beaucoup plus avec plus d’argent ne dispense pas d’allouer des ressources de précaution à d’éventuels combats futurs.

Ainsi un « décideur », médical ou politique peut-il être poursuivi s’il ne prend pas de précautions contre la grippe porcine, mais pas s’il n’alloue pas assez d’argent à la lutte contre la tuberculose…

Il est donc plus prioritaire de se prémunir contre les éventuels risques futurs que d’intervenir contre les sinistres en cours. Voilà bien une logique digne de Jacques Chirac et de nos politiques!

Jacques Chirac

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