EDF survolté par la concurrence

juin 25, 2007 on 5:57 | In Economie, France | Commentaires fermés

Le mélange public-privé, si courant dans l’économie française, donne lieu à bien des distortions de concurrence et autres bizarreries, sans parler de la célèbre « privatisation des profits et nationalisation des pertes », mais ce qui est en train d’arriver sur le marché de l’électricité laise JusMurmurandi sans voix.

La première trace visible pour le grand public a eu lieu la semaine dernière, quand l’action EDF, cotée en bourse depuis sa très partielle privatisation, a monté tant et si bien qu’EDF est devenue la première capitalisation boursière française, détrônant l’indéboulonnable Total. Que s’était-il donc passé pour justifier cet étonnante ascension du cours de l’action ?
D’autant qu’EDF, ancien monopole public, doit faire face à la libéralisation du marché, Bruxelles oblige. Et que cette libéralisation se traduit immanquablement par des pertes de part de marché face à de nouveaux entrants agressifs. On n’attendait donc pas EDF, obligé de livrer une bataille défensive sur son pré carré français, à pareille fête.

C’est que la libéralisation du marché est une disposition à deux volets. L’un, c’est l’ouverture à tout nouvel entrant qui le souhaite. Le second, c’est la libéralisation des prix. Et c’est là que se cache la pépite EDF. Car, pour l’essentiel, le prix de l’électricité dépend de la manière dont on la génère. Et donc, dans le monde en général, des prix du pétrole et du gaz, prix aujourd’hui très élevés. Donc les concurrents d’EDF vont appliquer des tarifs indexés sur les hydrocarbures.

Mais EDF, lui, opère le plus grand parc de centrales nucléaires au monde (60% de la capacité mondiale à lui seul), lui donnant 78% de son électricité d’origine nucléaire, donc avec des coûts que le prix du pétrole ne pousse que très peu à la hausse. Et de potentielles bonnes surprises si la durée de vie de ses centrales peut être prolongée de 10 ou 15 ans avant de devoir procéder à de très lourds investissements de remplacement de ses réacteurs actuels par des EPR et de démantèlement des anciennes centrales.

Donc la libéralisation des prix, aujourd’hui encadrés par la puissance publique, va se traduire par une hausse des tarifs d’EDF, qui pourra vendre ses kilowattheures nucléaires au prix des kilowattheures gaz ou pétrole. Et comme ses coûts n’auront pas monté, toute hausse de tarifs se traduira directement par une hausse vertigineuse de profits.

L’Etat qui paie la recherche et prend les risques de financer les investissements, mais les tarifs qui augmentent dès que la société est privatisée: vive la libéralisation et la concurrence! Es-ce bien la vision qu’en ont les eurocrates de Bruxelles, qui en l’occurence engraissent les technocrates de Paris qui les ont tant combattus pour s’opposer à l’ouverture du marché intérieur  ?

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