Niches grecques?

avril 9, 2010 on 8:08 | In Ca m'énerve, Coup de gueule, Europe, France, Incongruités, La Cour des Mécomptes, Poil à gratter | Commentaires fermés

Rééquilibrer les finances de l’État est un serpent de mer. Depuis que le tandem Mitterrand-Mauroy les a laissées plonger dans le déficit en 1981, un axiome a voulu que la « rigueur » appliquée par Raymond Barre ait coûté la ré-élection de Giscard, et que, donc, l’orthodoxie financière soit électoralement suicidaire face à des adversaires moins vertueux.

Mais, maintenant, il va bien falloir s’y mettre, populaire ou pas. Le déficit a atteint 8% du p.i.b. en 2009, ce qui est moins que « prévu », mais quand même gigantesque, puisque c’est quasiment 50% du budget. La dette cumulée file vers les 100% du p.i.b., ce qui veut dire que la charge des intérêts, à elle seule, absorbe toute marge de manœuvre politique. Et la Grèce, en allant heurter un véritable « mur de la dette », a sonné le tocsin pour tous les pays ultra-dépensiers.

Il est très difficile de réduire significativement le train de vie de l’État, vu que les Français mesurent la qualité du service public au nombre de gens qu’il emploie, et assimilent toute réduction quantitative à une réduction qualitative.

Alors François Fillon sort une nouvelle formule de son chapeau: réduire les niches fiscales. Les niches, ce sont toutes ces mesures dérogatoires qui permettent de payer moins d’impôts que la loi ne stipule au régime normal. Il y en a 468, qui coûtent 75 milliards d’euros au budget de l’État. Et, comme d’habitude, les 8 les plus importantes coûtent à elles seules 50% du total.

En fait, réduire ou supprimer une niche revient purement et et simplement à augmenter les impôts, ce que Nicolas Sarkozy refuse de faire. Mais, en fait, il le refuse directement, et pourrait plaider que réduire les niches n’est pas augmenter les impôts.

Ce qui énerve prodigieusement JusMurmurandi est la thématique qui commence à se généraliser suivant laquelle, grâce aux niches fiscales, des gens très riches ne paient aucun impôt. En quelque sorte de quoi alimenter la même polémique que le bouclier fiscal, qui coûte infiniment moins que le symbole qu’on veut en faire. Car les niches fiscales sont d’ores et déjà plafonnées, depuis fin 2008, et le plafond a ensuite été rabaissé.

Donc l’idée que les niches permettent aux « riches » de ne pas payer d’impôts est une fable populiste, qui ne serait par elle-même pas vraiment dangereuse si elle n’accréditait l’idée pour la plus grande majorité qu’ils sont victimes d’un système injuste et que, demain, tout va aller mieux parce que d’autres vont enfin payer leur juste part. Tout ceci au moment où comme nous nous égosillons à le répéter, presque un foyer sur deux ne paie pas un centime d’impôt sur le revenu.

Car, que ce soit la gauche ou la droite, demain, il faudra bien que quelqu’un explique aux Français que ce sont eux qui vont payer, ou, alors, nous n’aurons plus qu’aller nous faire voir chez les Grecs…

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