Fluctuat nec Mediator…

décembre 26, 2010 on 9:45 | In Ca m'énerve, Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, La Cour des Mécomptes, Poil à gratter | Commentaires fermés

Quel naufrage! Un médicament, le Mediator, fabriqué par le laboratoire français Servier, est soupçonné d’avoir causé des centaines, voire des milliers de décès. Conçu comme un anti-diabétique, il a été prescrit avant tout comme une pilule « pour maigrir ».

Là où cela devient choquant, c’est qu’apparemment, tout le monde savait depuis bien des années que le Mediator était problématique. Sa molécule active, le fenfluramine, a été retirée de la vente dans les années 90, après que, sous le nom d’isoméride, elle ait été jugée responsable de milliers de décès. Mais Servier, bien entendu, a toujours souligné dans sa communication que le Mediator n’était pas de la famille du fenfluramine.

Non seulement le Mediator a continué à être distribué pour un usage très différent de sa conception, mais il a continué à être bien remboursé (65%) par la Sécu, alors même que les études montraient un bénéfice thérapeutique faible, sans rapport avec son coût.

Alors, la question que tous posent est « pourquoi? » Pourquoi personne n’a-t-il rien fait? Évidemment les socialistes ont réponse à tout, réponse unique, même: c’est la faute à Sarko. Lequel Sarko aurait été « proche » de Jacques Servier, fondateur et propriétaire des laboratoires éponymes. Sauf que, manque de chance, le médicament eût du être retiré en 1999, date à laquelle, et pour trois ans encore, ils étaient eux-mêmes au pouvoir et pas Sarkozy. Donc l’affaire ne saurait « payer » pour eux s’ils la jouent politicienne. Vous noterez que JusMurmurandi, par « charité » ne donne pas le nom des socialistes qui étaient aux affaires à ce moment et pourraient en faire les frais…

En fait, la réponse à cette question est simple: personne n’était prêt à prendre une décision qui eut affaibli le laboratoire français, lequel laboratoire eût dénoncé tout à la fois le mauvais coup à l’industrie française, les pertes d’emploi, etc… Pour cela il eût fallu du courage.

Du courage pour prendre des décisions, voilà justement une denrée rare, dans un pays qui a inscrit le Principe de Précaution dans sa Constitution, c’est-à-dire contitutionnalisé le fait de ne rien faire. Car qui peut être sûr à 100%? Qui peut garantir contre l’avenir? Ce qui reflète le fait qu’en France, dès qu’il y a un « souci », fût-il « léger » (tout est relatif) comme la neige qui a étalé au grand jour les limites d’Aéroports de Paris, ou gravissime comme avec le Médiator, si les allégations sont prouvées, c’est la faute de l’État…. l’État dont on attend tout, y compris la démographie pour nos retraites, le climat pour les voyages de Noël et les bonnes performances de l’Équipe de France de football.

Mais un État dont on attend aussi qu’il protège contre l’avenir et à qui on délègue toutes nos responsabilités, moyennant quoi il est responsable de tout quand, a posteriori, il y a eu un problème. Donc un État qui ne prend plus aucune responsabilité pour innover, ni non plus pour stopper ce qui fonctionne. Car des remboursements pour des traitements sans bénéfices thérapeutiques, il n’y a pas que le Mediator, mais personne n’a le courage de faire….

En matière de courage, le champion n’est évidemment pas le député socialiste Gérard Bapt qui se précipite pour hurler avec les loups et exiger que Jacques Servier paye de sa poche les dégâts. Oubliant au passage que la France est un État de droit, et qu’il faudrait pour cela un nombre non négligeable de décisions de justice, ce qui est quand même mieux que des gesticulations de politico-démagogue à la Hugo Chavez, pour qui il suffit d’avoir de l’argent pour avoir tort et devoir payer.

Et maintenant la liste de 76 médicaments « sous observation » de l’AFSSAPS, c’est-à-dire dont on n’est pas sûr qu’ils soient sûrs, est déjà une nouvelle liste d’infamie. Il suffit que quelques médecin aient des soupçons, et hop! je te colle sur la liste, et je te publie dans les journaux, et j’ouvre mon parapluie avec un claquement sec. Au passage, que deviennent les avantages pour les malades qu’offre l’immense majorité des nouveaux médicaments? Est-ce un hasard qu’en France on appelle les « malades » des « patients »? Tout cela parce qu’un laboratoire a franchi la ligne jaune, et qu’aucun de ceux dont c’était la mission n’a averti d’un dérapage incontrôlé…

Décidément, bientôt, paraphrasant Sully, on pourra dire que lâcheté et immobilisme sont les deux mamelles de la France.

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