Le Mur de la Dette

avril 19, 2011 on 9:50 | In Ca m'énerve, Coup de gueule, Economie, Europe, France, Incongruités, International, La Cour des Mécomptes, Poil à gratter | Commentaires fermés

C’est la nouvelle expression à la mode. Elle est employée pour désigner les montants pharamineux que les banques vont devoir rembourser à partir de l’année prochaine, elles qui ont été refinancées si largement et à si bon compte par les différents banques centrales américaine, européenne, britannique notamment. L’idée étant que ces montants sont si importants qu’il sera impossible que toutes trouvent la totalité de l’argent nécessaire, ou alors à des taux prohibitifs, comme ceux que payent aujourd’hui l’Irlande, le Portugal ou la Grèce. Ainsi cette dernière paye près de 16% pour de l’argent à 2 ans….

Ce qui montre qu’il n’y a pas un Mur de la Dette, mais plusieurs. Celui de la dette bancaire, à n’en pas douter. Mais aussi, comme le montrent les pays « mal notés » de l’Union Européenne, celle des États. Et, depuis hier, un fait majeur vient de bouleverser le paysage financier mondial. une agence de notation, et pas la moindre, la très puissante Standard & Poors, a maintenu la note à long terme de l’Oncle Sam au tout-puissant AAA (ce qu’il y a de mieux), mais a abaissé sa perspective de « stable » à « négative ». La cause: un déficit du budget vertigineux, une accumulation de dettes au fil du temps, depuis le jour où George W. Bush a hérité d’un budget en excédent des mains de Clinton, et surtout une absence de volonté politique partagée des législateurs américains pour y remédier énergiquement.

C’est en effet le terrain de « jeux » (des jeux très belliqueux) favori entre Républicains et Démocrates. les Démocrates veulent restreindre les dépenses militaires et augmenter les impôts sur les riches, très largement diminués par leur ami Bush, tandis que les Républicains veulent restreindre les dépenses de l’État et sortir « par le haut » (par la croissance) en relançant l’économie … par des baisses d’impôts. Or non seulement les riches n’ont eu qu’à se louer des années Bush, mais les baisses d’impôts ont fait que moins d’un foyer américain sur deux paye l’impôt sur le revenu. Comme il n’y a pas de TVA nationale, et que la plupart des autres impôts sont au niveau des états, on voit bien que ce n’est pas un débat simple, dans une année préélectorale en plus.

Alors, que se passera-t-il si la note de la dette américaine chute de AAA à AA? Une chose est sûre, son coût augmentera, ce qui aggravera le déficit, et cela ouvrira une spirale dont il est bien difficile de sortir, comme les Grecs en font l’amère expérience.

Mais si on examine des hypothèses plus apocalyptiques, telles que des difficultés de financement de la dette américaine, JusMurmurandi se demande qui a le plus à perdre: les États-Unis, ou ceux qui détiennent des montants gigantesques de cette dette, tels la Chine et le Japon.

C’est la même chose avec la dette grecque, dont le coût croissant, malgré le « sauvetage » européen, étrangle le pays. Une « solution » simple pour en diminuer le coût consiste à la « renégocier » en taux et en remboursement, comme après une vulgaire faillite de république bananière. Le problème, c’est que les banques européennes se sont gavées de dette grecque pour obtenir des meilleurs taux de rendement de leurs placements en euros. Et que donc, tout bénéfice pour la Grèce est une perte pour les banques européennes, qui n’en ont vraiment pas besoin. On comprend donc la volonté de l’Allemagne, la France, l’Angleterre ou l’Italie de ne pas laisser tomber la Grèce. Sans compter l’Espagne, qui sait qu’elle serait le prochain pays après le Portugal à faire les frais de ce jeu de dominos infernal.

Ce qui fait que l’existence du Mur de la Dette est bel et bien avérée. Mais qu’on ne sait pas qui a le plus de chances de se fracasser dessus, si fracas il y a: les emprunteurs, ou les créditeurs?

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