Des acrobates de haut vol

août 5, 2011 on 8:31 | In Ca m'énerve, Coup de gueule, Economie, France, Incongruités, Insolite, Poil à gratter | Commentaires fermés

Cela fait quelque temps que le rapport du Bureau Enquête et Analyses a sorti son rapport sur l’accident du vol AF 447 et on commence enfin à comprendre ce qui s’est passé.

Tout d’abord, sachons que le rapport qui a été publié il y a quelques jours n’est pas le rapport définitif, même s’il apport un éclairage déterminant sur ce qui s’est passé pendant les dernières heures du vol (et non pas uniquement les quatre dernières minutes….

Premier point, la trajectoire choisie par l’équipage aux commandes.
Le rapport de la fin juillet ne revient pas dessus parce que cela a déjà été évoqué précédemment, mais c’est un élément très important pour comprendre ce qui s’est passé.
Parmi 6 vols présentés sur une courte animation (et pas moins de quatre vols AF sur ces six) seul le vol 447 prend la direction d’ »affronter » directement les cumulo nimbus, normalement redoutés par les pilotes.

En voici l’illustration :
http://www.bea.aero/fr/enquetes/vol.af.447/trajectoires/trajectoires010609.html

Par conséquent, le choix du pilote en fonction de traverser la formation nuageuse et non de la contourner comme tous ses confrères est très significative.

Un quotidien affirme même aujourd’hui que l’intégralité des enregistrements du cockpit, non dévoilée par le BEA et réclamée sans succès par les familles des victimes au juge chargé de l’enquête, révèle le peu d’importance qu’attache l’équipage à ce choix.

Deuxième point, lorsque l’on lit le rapport en détail, les causes de l’accident deviennent assez claires.

Reprenons les faits issus de l’étude des enregistrements.

La sonde de vitesse du pilote en fonction et celle de secours givrent et n’affichent donc plus une vitesse fiable.

Conséquence du « système » Airbus, le pilote automatique et le « régulateur de vitesse » de l’avion se désengagent.

A partir de là, l’équipage va s’enfermer dans un cercle vicieux qui va les emmener directement à la catastrophe.

En effet, pour des raisons diverses et variées qui incluent la formation qu’ils ont reçue et certains choix techniques du constructeur, il vont croire l’avion en sur-vitesse et non en sous vitesse, amenant l’avion à tomber comme une pierre à la vitesse de 180km/h.

C’est par conséquent pour cette raison, alors que l’incident des sondes de Pitot n’aura duré en tout et pour tour qu’une cinquantaine de secondes, que le plus jeune des pilotes va donner principalement « l’ordre à cabrer » pour ralentir l’avion pendant l’essentiel des quatre minutes qu’il aura fallu pour que l’avion s’abime dans l’océan.

Comme il le dit lui même, suivant la partie de l’enregistrement sonore publié, il ne comprend rien à ce qui se passe. Et ni le deuxième copilote ni le commandant, arrivé une minute et vingt six secondes après le début du problème, ne contrediront la thèse émise par le pilote en fonction.

Certes, JusMurmurandi ne peut juger la manière dont il a été été formé par son employeur, Air France, mais que cette formation n’ait pas permis de faire voler l’avion dans un mode dégradé, certes le fait que l’alarme décrochage ne sonne plus lorsque l’avion se déplace à une vitesse au sol inférieure à 60 miles nautiques (environ 100km/h) parce que le constructeur, Airbus estimant qu’à ces vitesses l’avion est au sol, certes que l’avion vole et de nuit et dans des turbulences constituent des éléments modérateurs de l’incapacité à piloter l’avion dans des circonstances « anormales ».

On assiste à des violations de procédures (les deux pilotes donnant des ordres à l’avion en même temps par exemple) similaires à celles rencontrées lors de l’accident du Concorde où le commandant et le copilote ne sont pas d’accord pour retourner à CDG ou pour se poser au Bourget.

La conclusion que tire JusMurmurandi dans cet accident tragique, c’est que cet équipage dès qu’il a été confronté à la nécessité de faire voler l’avion en mode moins que tout automatique, s’est trouvé complètement désarmé et désarçonné.

Là où cela donne des boutons à JusMurmurandi, c’est lorsque l’on entend la compagnie défendre son équipage mordicus, que l’on voit le principal syndicat le SNPL se retirer de l’enquête au motif que le BEA a retiré une recommandation destinée au constructeur et qui, à ses yeux aurait participé à l’exercice d’exonération de ses ouailles. Un exercice de haut vol, certes.

Comme Air France qui avait « oublié » de remettre les enregistreurs d’un vol de novembre 2009 venant aussi du Brésil dans un A330 et ayant subi des turbulences similaires. JusMurmurandi l’avait déjà dit à l’époque, Air France faisait redécoller l’avion illico presto sur l’Inde effaçant ainsi des informations aussi potentiellement utiles que néfastes.

Enfin pour clore cet article, rappelons que la question des sondes Pitot, qu’Air France a mis plus de temps que certaines de ses consœurs à renouveler de Thalès modèle A en B voire en Goodrich n’explique pas l’accident.

Air Caraïbes, compagnie ô combien plus modeste qu’Air France possède elle aussi des A330.

Qui ont eux aussi subi des avaries de sondes.

Mais sans incident les pilotes étant mieux formés, et en les changeant autrement plus vite lorsque le modèle initialement installé s’est retrouvé mis en question.

Mais bon, tout va bien dans le petit monde d’Air France.

Ne vient on pas de renouveler son dirigeant à la publication de ce rapport et pendant une énième grève des navigants savamment étouffée médiatiquement au pire moment de l’année pour ses clients, tandis que le comité d’entreprise continue de sombrer financièrement dans l’indifférence la plus totale ?

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