Qu’est-ce qu’on n’a pas -ou plus- le droit de dire?

mai 28, 2012 on 10:03 | In Ca m'énerve, Coup de gueule, Economie, Elections présidentielles 2012, Europe, France, Incongruités, Moi, Président, Poil à gratter | Commentaires fermés

Christine Lagarde en a eu marre d’entendre les Grecs vilipender le FMI, dont elle est directrice générale, au motif qu’ils trouvent que la potion d’austérité qu’elle les force à avaler en contre partie des centaines de milliards de cadeaux qu’ils reçoivent, est trop amère. Les cadeaux, ils veulent bien, sous forme d’abandon de créances, c’est-à-dire de dettes qu’ils ont contracté et qu’ils sont autorisés à ne jamais rembourser, mais l’austérité, non!

Alors elle leur a dit qu’il  était temps qu’ils prennent leur destin en main au lieu de faire de leur protestation vertu. Et, pour commencer, qu’ils payent leurs impôts au lieu de tout faire pour l’éviter, comme depuis toujours. En quelque sorte l’application de la vieille maxime de La Fontaine: « aide-toi et le Ciel t’aidera! ». Et elle rajoute qu’en matière de compassion, car c’est à cela que les Grecs font appel, il y a plus malheureux qu’eux, les enfant affamés d’Afrique par exemple.

Depuis, les Grecs, jamais à court de se sentir victimes, proclame qu’elles les a humiliés, et la gauche française réclame sa démission.

Les faits, pourtant, sont clairement en ligne avec les déclarations de Mme Lagarde.

La moitié à peu près du PIB grec est de l’économie souterraine, donc sans aucun impôt. Les armateurs ont réussi à faire inscrire leur totale exonération d’impôts dans la constitution. Comme si cela ne suffisait pas, ils ne déclarent les salaires de leurs marins que pour 20% de leur valeur réelle, afin de ne pas payer de charges sociales non plus. La très riche Église orthodoxe grecque ne paye aucun impôt. Et il n’y a pas de cadastre sur lequel fonder un impôt immobilier. Des réformes ont été promises sur tous ces sujets, mais elles tardent tant à se concrétiser que la réelle volonté de la Grèce de les mettre en œuvre n’est pas évidente. De plus, craignant la sortie de leur pays de la zone Euro, les Grecs retirent maintenant massivement leur épargne des banques grecques pour la mettre à l’abri à l’étranger. On comprend que ce soit leur souhait de ne pas être lessivés par un retour à la drachme. Mais en se protégeant individuellement, ils affaiblissent collectivement leurs banques et leur pays, qui n’en a vraiment pas besoin. il est vrai que le mot « civisme » pour montrer ce dont ils manquent cruellement vient du latin, et non du grec…

Et les Grecs finiront par constater que, s’ils sont lâchés par le FMI et l’Union Européenne, la réalité de leur situation sera bien pire encore. Il n’y avait qu’à voir ce week-end l’excellent reportage sur l’Argentine, pays cité sans arrêt en exemple par Arnaud Montebourg pour avoir réussi en choisissant la croissance plutôt que l’austérité du FMI. Les subventions sociales ont été multipliées par 10 en 20 ans, sauf que l’État n’a plus d’argent pour soutenir ce fardeau insoutenable. Et l’économie et la monnaie sont dans un tel état que le secteur le plus florissant de l’économie, aujourd’hui, est le troc…

Tout ceci non pas pour enfoncer plus encore les Grecs, mais pour montrer que Lagarde avait largement le droit de dire ce qu’elle a dit, voire le devoir de le faire.

Mais cela ne suffit à nos chers socialistes, dont le porte-parole, la charmante et si photogénico-médiatique Najat Vallaut-Belkacem, affirme que « nous n’avons pas de leçons à donner aux Grecs ».

Eh si, nous en avons, parce que la France a les plus gros engagements envers la Grèce, et que, si les Grecs continuent de faire les cons, pour parler poliment, c’est nous qui allons dérouiller. C’en est à se demander si les socialistes comprennent même qu’ils ont en Grèce les intérêts français à défendre. Au lieu de tenter de marquer des points de politique intérieure en montrant comme dans la « Ferme des Animaux » d’Orwell que « Croissance = Bien, Rigueur = Mal ».

 

Autre exemple de ce qu’on n’a pas le droit de dire: Eric Zemmour, quand il affirme que Taubira a déjà choisi son camp, celui des femmes et des mineurs, et que les hommes blancs n’en font pas partie. Il semble que ce soit « la provocation de trop », et qu’il soit viré de l’antenne en septembre. Pour un nouveau pouvoir qui a tant critiqué Sarkozy, et qui en fait un tableau apocalyptique quand il osait attaquer un journaliste, ils ont la peau bien tendre, s’ils s’émeuvent de si peu alors qu’ils trouvaient normal de tant balancer quand ils étaient dans l’opposition.

Et où sont passées, la pluralité, la liberté de la Presse et la liberté d’expression? Autant de valeurs qui ne sont pas, semble-t-il donc, des « valeurs de la République » (copyright Jean-Marc Ayrault), puisqu’on peut manifestement les fouler aux pieds sans conséquences…

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