La joie exquise de la défaite

novembre 13, 2012 on 3:47 | In France | Commentaires fermés

Nicolas Sarkozy et la droite ont perdu les élections présidentielles et législatives. La gauche a tous les pouvoirs en France, sans aucune exception. Et si, en fait, Sarko & Co. avaient gagné à perdre?

Parce que le moins qu’on puisse dire, c’est que le PS et la gauche ne sont pas à la fête depuis leur victoire. Alors, bien sûr, c’est en partie de leur faute, par ignorance et par incompétence. Mais en partie seulement, parce que l’héritage de la montagne de dettes, même si la montagne est sortie de terre sous François Mitterrand en 1981, n’est pas entièrement due à la gauche, loin s’en faut. Parce que le déficit budgétaire, et la crise économique mondiale, dont ils ont nié l’existence sauf pour l’attribuer à Nicolas Sarkozy ne sont pas de leur faute non plus, pas plus que la crise de l’euro.

Alors maintenant, Moi Président et son Premier Ministre, Lui Président, ont pris des mesures pour limiter le déficit avec une ardeur sans précédent. Et comme un malheur ne vient jamais seul, il leur faut redonner un ballon d’oxygène à des entreprises françaises en très mauvais état, avec encore plus d’impôts et de réductions de dépenses publiques.

Bref, la popularité des dirigeants de gauche s’effondre, et la base grogne. Ce n’est d’ailleurs pas près de s’inverser, les mesures fiscales ayant été annoncées mais pas encore subies, et les pertes d’emploi de ce mois-ci n’étant pas encore les dernières loin s’en faut. Il ne faut pas être sorcier pour en déduire que, comme 2013 s’annonce comme une année de récession, la gauche doit se préparer à une fessée aux municipales de 2014. Ce n’est pas un hasard si Hollande a décidé de décaler à 2015 deux élections prévues pour 2014. Encore un instant, Monsieur le Bourreau…

Comment cela finira-t-il? Une partie de la gauche se cabre devant une politique d’orthodoxie financière qu’ils associent à la droite dure, et pour laquelle ils n’ont ni appétit, ni mandat populaire. Ceci reflète en fait une dualité au sein du PS entre une aile social-démocrate à l’allemande, à laquelle appartiennent Moi Président et Lui Président, et une aile gauche qui croit à une économie dirigée et pas à une économie de marché. François Mitterrand, en homme habile, a su éviter la cassure entre ces deux sensibilités si différentes. Mais il est mort, et Hollande ne partage avec lui que la fonction et le prénom.

Soyons clairs, il n’est que trop certain que la droite, si Sarkozy avait gagné, même si elle avait appliqué des recettes en partie différentes, n’aurait pas pu éviter la totalité des problèmes, ni de l’impopularité qui en découle. Bref, elle serait en ce moment en mauvaise posture en lieu et place de la gauche.

Il est donc relativement prévisible que la gauche du PS finisse par avoir assez de voter des textes qui leur paraissent contre nature. Comme le plan de Hollande pour revenir à 3% de déficit l’année prochaine suppose une croissance de 0,8%, et que ça ne risque d’arriver que dans ses rêves, il va falloir encore plus de rigueur, et une spirale à la grecque. Là, un jour, par exemple après une lourde défaite aux municipales, la gauche de la gauche va dire « non », et ce sera la chute du Gouvernement.

Là, plusieurs schémas sont possibles. Des élections anticipées, avec la victoire-revanche de l’UMP. Ou une recomposition autour d’un centre emmené par Borloo, regroupant la droite de la gauche et une aile sociale de l’UMP qui ne se reconnaîtrait dans un leadership Copé, par exemple. Mais en tout état de cause, la gauche décomposée serait hors d’état de se reconstituer à l’identique.

La droite se retrouverait débarrassée du PS version 1971. Tout ceci grâce à la défaite de 2012. Qui pourrait ainsi, finalement, se transformer en sa plus grande victoire. Pas de celles qui, comme en 2007 repoussent d’un cycle l’alternance, mais de celles qui détruisent l’opposition. Des défaites comme cela, finalement, ce n’est pas si mal, bien au contraire…

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