Moralisation à la mode socialiste?

avril 13, 2013 on 8:04 | In Ca m'énerve, Coup de gueule, Elections présidentielles 2012, France, Incongruités, Insolite, La Cour des Mécomptes, Moi, Président, Poil à gratter | Commentaires fermés

Les socialistes n’ont que ce mot-là à la bouche. Ils vont moraliser. Comme si ça les exonérait des affaires qui agitent le paysage judiciaire français, Guérini, Cahuzac, Kucheida, DSK, etc.

JusMurmurandi de son côté préférerait que les personnels politiques aient un comportement moral plutôt que d’être des immoraux tenus en laisse contre leurs instincts par une loi de plus. Parce qu’en matière de lutte entre gendarmes et voleurs, on sait qui a le plus souvent l’avantage.

Mais bon, il faut aussi dire en défense des socialistes, que le mot « moralisation » est tellement moins dur à prononcer que « chômage ».

Sauf que les socialistes vont commettre un certain nombre de fautes aussi ravageuses que prévisibles. D’abord y fourrer la loi sur le cumul des mandats, loi qu’ils ont promise, mais qu’ils n’avaient pas assez de votes pour faire passer, n’arrivant pas à se convaincre eux-mêmes. Si ce sujet fait partie de cette loi, c’est affirmer que le cumul est immoral, et il faudra que quelqu’un m’explique pourquoi, et me dise comment alors ils peuvent se satisfaire que tous les pontes du PS aient été ou soient encore de grands immoraux.

La deuxième faute est de passer par la loi, qui ne peut être rétroactive, alors que la morale l’est. Je m’explique. Le projet va rendre les condamnés pour certains délits essentiellement financiers et fiscaux, inéligibles à perpétuité et incapables d’occuper certains postes. Pourquoi pas, c’est plutôt une bonne idée, pour éviter de voir des condamnés y compris à de la prison ferme revenir aux affaires sitôt leur sortie de prison, comme Mellick ou Balkany. Le problème, c’est que la loi ne peut, en France jamais être rétroactive. Les « nouveaux condamnés » seront donc frappés, mais les anciens condamnés ne le seront pas et pourront vaquer gaillardement à leurs petites affaires. Et cette inégalité-là, pour des personnes ayant commis les mêmes délits, si elle est légale, n’est certes pas morale. Si le PS était sérieux à propos de moralisation, il devrait l’appliquer aussi, par la voie de l’expulsion puisque la voie légale est impossible, à tous les anciens condamnés, à commencer par Jean-Marc Ayrault ou Jean-Paul Huchon. Vous voulez parier qu’il y a zéro chance que le PS le fasse?

La troisième faute est celle de vouloir éliminer les conflits d’intérêts par cette loi. JusMurmurandi comprend bien l’intérêt d’empêcher un député ou sénateur de défendre, comme avocat, consultant ou lobbyiste par exemple, des causes qui lui rapportent financièrement auprès des ses collègues de l’un ou l’autre Chambre. Le problème c’est comment ils abordent la question.  Ils veulent, par exemple, interdire l’exercice de la profession d’avocat en même temps que celle de député. Ce qui leur permet d’aligner une brochette de leaders de l’opposition, comme Jean-François Copé, Jean-Louis Borloo, François Baroin, ou Gilbert Collard.

Mais, si on veut abolir les conflits d’intérêts, non seulement des élus eux-mêmes, mais aussi de leurs ascendants, descendants et collatéraux, comme c’est recommandé dans un docte rapport, comment faire quand il s’agit de défendre des intérêts catégoriels? Croit-on que les dizaines de députés socialistes qui sont fonctionnaires en font abstraction au moment de voter le budget de la fonction publique? Que les professeurs ne portent aucun regard intéressé au budget de l’Education Nationale? Les médecins sur le budget de la Santé?

Un exemple parmi beaucoup. Une fois nommé Garde des Sceaux, le très hautement moral et insoupçonnable Robert Badinter, jusque là avocat, prend une mesure de grâce pour une catégorie de condamnés. Cette mesure, très, très, très ciblée, ne touche que 6 personnes et les libère de prison. On pourrait se demander à quoi bon une mesure de grâce pour si peu d’effet. Sauf que l’une des 6 personnes était la richissime Christina von Opel, client du cabinet de… Robert Badinter. Que n’auraient dit les mêmes socialistes si l’avocat-et-Ministre-de-la-Justice  avait été non pas le socialiste et ultra-vertueux (excusez le pléonasme) Badinter, statufié vivant pour avoir mené le combat victorieux d’abolition de la peine de mort, mais le grand ami de Ziad Takieddine, avocat et de droite, donc trois fois crapuleux, Jean-François Copé?

Moraliser ne devrait-il pas commencer par exiger des hommes politiques qu’ils tiennent leurs promesses de campagne? Si on le faisait, peut-être les Français seraient moins souvent appelés à voter pour des faiseurs de rêves, qui tournent ensuite au cauchemar. Cauchemar, comme la République Irréprochable promise la main sur le coeur et l’accent partial (pardon pour ce lapsus ô combien significatif, je voulais écrire « martial », et j’ai écrit « partial », vraiment désolé) par  Moi Président.

 

 

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