Rouler sous la table

février 29, 2008 on 3:03 | In France | 3 Comments

Daniel Bouton passe à l’offensive. Non content d’affirmer l’excellence d’un « business model » qui a conduit à perdre près de 3 milliards d’euros sur le marché des « subprimes », et à subir près de 5 milliards d’euros de pertes à la suite des manœuvres d’un trader prétendument isolé, Jérôme Kerviel, il affirme aujourd’hui: « ma démission n’est plus sur la table! »

JusMurmurandi voudrait rappeler quelques évidences. Pour avoir perdu beaucoup moins, en proportion, que la Société Générale, Citigroup et Merril Lynch ont viré leurs PDG respectifs. Quand il parle de l’excellence du « business model », Bouton devrait s’interroger sur ce qui a fait les pertes de 2007, si ce n’est justement le même système qui, dans d’autres circonstances, a permis les bons résultats passés dont il se targue.

Car, même si Kerviel a agi seul, les avertissements n’ont pas manqué, tant internes qu’externes, qui ont tous été ignorés. La fameuse position de Kerviel valait au 31 décembre 2007 plus d’1,4 milliards d’euros, et était quasiment soldée. En d’autres termes, ce profit était bien dans les comptes de la Générale, et en réel, pas en virtuel, et ça n’a gêné personne! Venant de la part d’un trader de niveau moyen censé prendre des positions à risque nul, ça fait quand même beaucoup.

De toute façon, les faits sont têtus, et Bouton et la Générale ont du solder leur augmentation de capital à près de 45% de moins que le cours de Bourse pour trouver des preneurs. JusMurmurandi s’étonne d’ailleurs du slogan de la banque, qui invite les actionnaires à souscrire à cette augmentation « pour participer à la croissance » alors qu’il s’agit de participer au sauvetage. Parler de croissance est curieux quand les activités de marché comme celles qu’exerçait Kerviel, et qui représentaient une des sources de profit majeures de la Générale, vont diminuer de volume en fonction des mesures de contrôle et de limitation mises en oeuvre à la suite du désastre.

Tout ceci nous ramène à Daniel Bouton, qui ne veut plus démissionner. JusMurmurandi rappelle que tout PDG est révocable à tout moment par son Conseil d’Administration [révocation dite "ad nutum", selon les besoins] et sans qu’il y ait besoin de motif. Si le conseil veut le départ de Bouton, il peut le lui imposer sans recours. Et ça, Bouton le sait bien sûr. Donc si celui-ci dit que sa démission n’est plus sur la table, cela veut tout simplement dire qu’il faudra le virer. Et que là, un juteux contrat, signé par un conseil complaisant à un PDG qui mène son entreprise sur le chemin de la croissance prospère, ne manquera pas d’octroyer de multiples et gras avantages. Bref, c’est juste une minable affaire de gros soux.

A moins que… A moins que Daniel Bouton n’ait finalement compris sa responsabilité dans ce désastre sans précédent dans l’histoire de la finance non seulement française, mais mondiale. Et que, écrasé par le poids de cette responsabilité, il indique que sa démission n’est plus sur la table parce que, couvert de honte, il se cache désormais sous la table…

Daniel Bouton, un peu fripé

3 commentaires

  1. Ah, la photo est terrible ! Est-ce le costume du Chicago des années 30, les chaussures vieux Mayfair sous un pantalon trop court, les tempes d’hydrocéphale ? Ou bien est-ce le bonhomme qui bousille ce qui serait chic porté par un autre ?

    Commentaire by dom — 1 mars 2008 #

  2. Daniel Bouton sous la table, couvert de honte, vous rigolez: il pérorait dans les Echos ce même jour, arrogant comme toujours et même plus que jamais!

    Commentaire by Elise — 6 mars 2008 #

  3. Dom, vous avez raison, et votre commentaire reflète admirablement l’action de Daniel Bouton: elle bousille ce qui serait efficace fait par un autre!

    Elise, vous aussi avez raison. Daniel Bouton semble faire partie de ces hommes si accrochés à leur poste qu’il faille, pour qu’il le quitte, le faire évacuer manu militari.

    Commentaire by JM2 — 6 mars 2008 #

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